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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 41e Législature,
Volume 148, Numéro 36

Le jeudi 1er décembre 2011
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 1er décembre 2011

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La Convention des Nations Unies sur les armes à sous-munitions

Le troisième anniversaire de la signature

L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, le samedi 3 décembre, il y aura trois ans que le Canada s'est joint à des pays de partout dans le monde à Oslo, en Norvège, pour la signature officielle de la Convention des nations Unies sur les armes à sous-munitions. Cette convention, qui est le résultat de 18 mois de travail par les groupes de la société civile et les États participants, interdit l'emploi, le transfert et la production d'armes à sous-munitions, exige la destruction des stocks et demande que des ressources suffisantes soient offertes pour aider les survivants et nettoyer les régions contaminées.

À l'heure actuelle, 111 pays ont signé la convention et, de ce nombre, 66 l'ont ratifiée. Même s'il est l'un des premiers pays à l'avoir signée, le Canada n'a pas encore ratifié la convention, qui est entrée en vigueur le 1er août 2010.

Les armes à sous-munitions sont particulièrement cruelles, inhumaines et aveugles parce qu'elles sont conçues pour causer le maximum de dommages sur une vaste étendue en se dispersant en un grand nombre de sous-bombes. En plus de la dévastation immédiate qu'elles causent au moment de l'impact, les armes à sous-munitions présentent une menace permanente pour la population locale, sous la forme de composantes non explosées. En ce troisième anniversaire de la signature de cet important document, j'espère que le Canada présentera bientôt au Parlement une mesure législative visant à ratifier officiellement cette convention.

Les audiences parlementaires aux Nations Unies

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur un discours prononcé par la vice-secrétaire générale des Nations Unies, Mme Asha-Rose Migiro, aux Nations Unies, à New York, lundi. Elle s'adressait aux délégués participant aux 211e audiences parlementaires organisées aux Nations Unies par l'Union interparlementaire, dont je suis le président canadien.

L'Union interparlementaire est la plus grande assemblée de parlementaires du monde, avec 160 pays membres. L'union a également le statut d'observateur aux Nations Unies.

Au cours de son allocution, Mme Migiro a déclaré que le secrétaire général et elle accordaient une grande importance au renforcement des liens entre les Nations Unies et les membres de l'Union interparlementaire. Elle a déclaré que les parlementaires, par l'intermédiaire de l'union, jouaient un rôle influent dans les décisions du Conseil de sécurité de l'ONU. Elle a insisté sur l'importance de la diplomatie parlementaire. En effet, les parlementaires jouent un rôle capital dans l'établissement des relations diplomatiques entre les pays. Pour citer le Président du Sénat, le sénateur Kinsella, je dirai ceci :

[...] la diplomatie parlementaire canadienne doit être un complément important des initiatives diplomatiques prises par le gouvernement dans notre régime politique fédéral.

Dans son discours, Mme Migiro a aussi insisté sur l'importance de la reddition de comptes. Elle a déclaré ce qui suit :

La reddition de comptes en politique et la gouvernance démocratique sont inséparables. Les deux sont essentielles à la paix, au développement et aux droits de la personne. Vous les parlementaires, incarnez la reddition de comptes en politique.

Mme Migiro a énuméré les moyens que peuvent prendre les parlements pour promouvoir la gouvernance démocratique. Elle a appelé les parlementaires à encourager les jeunes à prendre part aux affaires publiques courantes et à faire en sorte que nos populations soient également représentées au Parlement. Elle a souligné que les femmes composent moins de 20 p. 100 des parlementaires dans le monde. C'est 10 points de pourcentage de moins que l'objectif de 30 p. 100 fixé par l'ONU il y a bien des années.

Elle a également déclaré qu'il nous fallait faire davantage pour que les groupes minoritaires aient des sièges dans les parlements. Cela peut se faire en éduquant les citoyens de ces groupes et en leur permettant d'acquérir les compétences qui leur permettront de saisir les possibilités de se mettre au service de la population.

Honorables sénateurs, Mme Migiro a insisté sur l'importance pour les parlements de faire face à la corruption et au crime organisé. Le gouvernement conservateur est de son avis. Il s'est engagé à faire passer au premier plan la sécurité des Canadiens en adoptant différentes mesures de lutte contre le crime organisé, comme le projet de loi C-10. Par ailleurs, le gouvernement du Canada, allant dans le sens des recommandations de Mme Migiro, a promulgué l'an dernier un nouveau règlement pour renforcer la capacité des agences d'exécution de la loi de lutter contre le crime organisé.

(1340)

Honorables sénateurs, en conclusion, les audiences parlementaires organisées par l'UIP ont permis aux parlementaires du monde entier de réaffirmer leur volonté de faire preuve de transparence sur la scène internationale et de participer à la diplomatie parlementaire. Ce fut un

honneur pour moi de représenter le Canada lors de cette importante conférence et de contribuer à la dimension parlementaire des Nations Unies.

Merci.

Les baha'is en Iran

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Je prends la parole devant vous aujourd'hui afin de parler, encore une fois, de la violation des droits des baha'is en Iran. Depuis ma dernière intervention sur le sujet au Sénat, le gouvernement iranien a pris une nouvelle mesure sans précédent dans le cadre de son oppression systématique de la minorité baha'ie. Cette fois-ci, les tribunaux iraniens ont condamné sept enseignants baha'is pour leurs activités au sein de l'institut baha'i pour l'éducation supérieure.

L'institut a été fondé par les baha'is en 1987 afin d'éduquer les jeunes baha'is, qui n'ont toujours pas accès aux universités iraniennes en vertu de la politique officielle de l'État . L'institut menait ses activités ouvertement et donnait bien souvent les cours dans des salons ou autour d'une table de cuisine. D'anciens professeurs, congédiés en raison de leur croyance religieuse, enseignaient à des jeunes des matières telles que l'ingénierie et la psychologie.

En mai dernier, les autorités iraniennes ont procédé à une série de descentes concertées dans 39 résidences et ont arrêté 19 baha'is. Le 18 octobre, nous avons appris que sept enseignants baha'is avaient été condamnés à des peines d'emprisonnement totalisant 30 ans.

Parmi les enseignants qui ont écopé d'une peine d'emprisonnement de quatre ans, mentionnons Nooshin Khadem, résidente permanente canadienne et titulaire d'une maîtrise en administration des affaires de l'Université Carleton. Nooshin est venue au Canada parce que l'Université Carleton a reconnu son diplôme de l'institut baha'i comme équivalence d'un diplôme de premier cycle. Elle est ensuite retournée en Iran pour enseigner à d'autres.

Elle se trouve maintenant en prison. Son « crime »? Être rentrée en Iran avec le bagage de connaissances acquis pendant ses études. Deux autres baha'is attendent encore leurs audiences pour des crimes semblables.

Kamran Rahimian et Faran Hesami ont terminé leurs études supérieures en counseling à l'Université d'Ottawa. À leur retour en Iran, ils se sont mariés et ont eu un fils. Ils auraient été accusés d'avoir obtenu des diplômes « illégaux » au Canada.

Le bambin de deux ans vit maintenant avec des membres de la famille pendant que ses parents attendent leur procès en prison. Quelle cruauté de la part d'un gouvernement qui emprisonne ses citoyens parce qu'ils tentent d'éduquer leurs concitoyens et qui érige en crime le processus d'apprentissage.

Le mois dernier, à New York, Heiner Bielefeldt, rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté de religion ou de conviction, a déclaré que la persécution des baha'is par l'Iran est parmi les « pires manifestations d'intolérance et de persécution religieuses » dans le monde aujourd'hui. Il a ajouté ce qui suit : « Le gouvernement iranien mène une politique de persécution systématique [...] avec l'intention de détruire cette religion partout dans le monde. »

Plus tôt ce mois-ci, l'Assemblée générale des Nations Unies a condamné l'Iran pour ses violations graves et continues des droits de la personne. La résolution parrainée par le Canada, qui dressait la longue liste des abus perpétrés en Iran, a été adoptée par la plus forte majorité enregistrée jusqu'ici cette année.

Honorables sénateurs, nous formons une nation qui défend les droits de la personne et qui valorise le pluralisme religieux et nous devons continuer de faire face directement à la menace que représente l'Iran pour son propre peuple. L'Iran n'écoute peut- être pas aujourd'hui, mais le peuple iranien, lui, est à l'écoute. Les Iraniens doivent savoir que le Canada sera solidaire avec eux et qu'il continuera de défendre leurs libertés et leurs droits fondamentaux.

Honorables sénateurs, dans le discours du Trône, il est précisé que, dans le but de promouvoir les droits de la personne, le gouvernement créera le Bureau de la liberté de religion afin d'aider à protéger les minorités religieuses et de promouvoir le pluralisme. Lorsque le gouvernement aura mis sur pied ce bureau, j'aimerais qu'il accorde la priorité aux défis auxquels sont confrontés les baha'is en Iran.

La Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes

L'honorable Nancy Ruth : Honorables sénateurs, nous allons bientôt souligner la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Collectivement et individuellement, il nous incombe d'éliminer la violence faite aux femmes, et ce, dans notre vie professionnelle et personnelle.

Saviez-vous que, selon une étude réalisée récemment par l'Université de la Colombie-Britannique, la violence coûte 6 milliards de dollars par an aux contribuables? Pensez aux coûts de maintien de l'ordre, aux frais hospitaliers, aux services sociaux, aux refuges et aux possibilités économique non exploitées.

Voici des statistiques : 51 p. 100 des Canadiennes ont été victimes d'un ou de plusieurs actes de violence physique ou sexuelle depuis leur 16e anniversaire et 23 p. 100 des victimes de sexe féminin ont déclaré avoir été battues, étranglées ou menacées au moyen d'une arme à feu ou d'un couteau. Les femmes autochtones sont cinq fois plus à risque que les autres femmes de mourir à la suite d'un acte de violence. Au total, 58 500 femmes ont recours à des refuges chaque année au Canada.

La violence dont les femmes sont victimes les empêche d'accéder à l'égalité. Leur capacité de vivre leur vie n'est pas seulement entravée par la violence physique dont elles sont la cible, mais également par la peur de la violence. La violence a des répercussions sur la vie quotidienne des femmes : elle dicte leur façon de s'habiller, les endroits où elles se rendent et avec qui elles entretiennent des contacts.

Dans son plus récent rapport, la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes, a déclaré que l'inégalité et la discrimination sont les principales causes de la violence contre les femmes. Les femmes sont victimes de discrimination économique et systémique, ce qui les rend plus vulnérables aux agressions et limite leur capacité d'obtenir justice lorsqu'elles sont victimes d'actes de violence.

La violence contre les femmes continue d'être un problème social et économique majeur et persistant au Canada. La violence empêche les femmes de jouir de leurs droits fondamentaux. Elle dévaste des familles et des collectivités entières et a des répercussions sur nos systèmes de santé, de justice et de services sociaux.

Le gouvernement du Canada, dans le discours du Trône, a réitéré son engagement à mettre fin à la violence contre les femmes.

Le travail accompli dans le cadre de l'Initiative de lutte contre la violence familiale est un exemple parmi tant d'autres de cet engagement. Au total, 12 ministères et agences participent à cette initiative visant à réduire la violence dans les familles et la société en général.

Je félicite également le Centre national d'information sur la violence dans la famille pour le travail qu'il accomplit. C'est une ressource pour tous les Canadiens qui cherchent de l'information sur la violence au sein de la famille et des solutions pour y remédier.

Je félicite les organisations féminines partout au pays du travail qu'elles accomplissent pour défendre les droits de la femme. Je souligne que Condition féminine Canada leur fournit une partie de l'aide dont elles ont besoin pour mettre un terme à la violence contre les femmes. Cette semaine, Condition féminine Canada a lancé un appel de propositions visant à réduire la violence contre les femmes sur les campus des universités et des collèges.

Comme toujours, il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Les plus récents témoignages de femmes membres de la GRC provenant de toutes les régions du Canada, qui ont parlé publiquement de la discrimination et du harcèlement dont elles ont fait l'objet et des répercussions que cela a eu sur leur vie personnelle et professionnelle, nous rappellent que nous ne devons pas relâcher nos efforts.

Honorables sénateurs, lorsque nous parlons des femmes, nous parlons de nos mères, de nos sœurs, de nos épouses et des membres de notre famille. Les femmes sont le ciment de la société. J'exhorte tous les sénateurs de même que les gens de tous les segments de la société à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour éliminer la violence à l'égard des femmes et offrir un meilleur avenir à tous les Canadiens.

La sécurité internationale

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, alors que les derniers militaires canadiens quittent aujourd'hui la zone de combat de Kandahar, et compte tenu du fait que la démobilisation ou, du moins, des coupes budgétaires se profilent à l'horizon, j'ai décidé de parler des militaires, plus particulièrement de la sécurité, de la sécurité internationale et de notre engagement.

Le programme de sécurité du Canada repose sur ses forces militaires, qui doivent être en mesure de défendre notre pays et d'appuyer notre politique étrangère à l'extérieur du pays. Pendant de nombreuses années, la politique de défense nationale du Canada a eu trois objectifs principaux : défendre le Canada, aider les États- Unis à défendre l'Amérique du Nord, et participer au maintien de la paix et de la sécurité à l'échelle internationale. Récemment, les soldats canadiens ont pris part à des opérations internationales, en Afghanistan notamment au sein de la coalition, ainsi qu'à des missions de maintien de la paix dans les Balkans, au Timor oriental, en Éthiopie, en Érythrée, au Kosovo, au Congo, au Darfour, au Cambodge et au Rwanda.

Le Canada doit maintenant faire des choix difficiles en ce qui concerne ses engagements militaires. Étant donné que la capacité d'un pays à influencer les décisions en ce qui concerne la sécurité internationale dépend, en partie, de sa capacité à accepter des responsabilités, le type et le niveau de capacité militaire du Canada aura des répercussions sur le rôle que nous serons appelés à jouer dans le monde en tant que l'une des principales puissances intermédiaires.

De plus en plus, les forces internationales sont appelées à prendre part à divers engagements, qu'il s'agisse de participer à des combats, de rétablir l'ordre, d'appliquer des accords de paix ou de protéger des civils.

Au cours des prochaines années, il est probable que les forces militaires aux capacités variées seront très en demande. Les Canadiens devront déterminer ce que nos militaires peuvent faire pour mieux appuyer notre politique étrangère dans un cadre structuré.

Depuis longtemps, le Canada croit que la capacité militaire n'est qu'un volet d'une approche globale à l'égard de la sécurité, que ce soit au pays ou à l'étranger. Notre approche en ce qui concerne la sécurité des personnes — un terme qui est de moins en moins utilisé — dans le cadre de la politique étrangère tient compte du fait qu'il est essentiel d'assurer la sécurité des États, mais que cela ne suffit pas à assurer la sécurité de leurs citoyens. Il est également essentiel de se pencher sur les causes civiles des conflits, qui alimentent l'instabilité de la société et créent des conditions où l'extrémisme politique et religieux peut se développer.

(1350)

Compte tenu des dangers que posent les États fragiles et mal dirigés, la communauté internationale doit, en collaboration avec eux, renforcer leurs institutions gouvernementales et leur système judiciaire afin que les dirigeants doivent rendre des comptes et que la primauté du droit soit respectée. Pour que les États fragiles soient stabilisés, il faut des mesures de prévention des conflits et un engagement soutenu à l'égard de la reconstruction des États qui sortent d'un conflit.

Ces tâches ne peuvent être accomplies que si le Canada se fait le partenaire d'autres gouvernements, d'institutions multilatérales, d'intervenants du secteur privé et de sociétés civiles, et ce faisant, qu'il reconstitue ses capacités grâce à une initiative pangouvernementale qu'il applique, finance et met en œuvre. Il est temps de réexaminer nos engagements envers l'ONU. De plus, si je peux me permettre un peu de publicité, il est temps que des sénateurs participent au groupe de prévention des génocides qui se penche précisément sur les engagements du Canada concernant la prévention des atrocités de masse par d'autres moyens que les mesures purement militaires.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Le Président du Sénat

Visite d'une délégation en Slovaquie, au Saint-Siège, à l'Ordre souverain militaire de Malte et en Italie, du 14 au 20 octobre 2010—Dépôt du rapport révisé

L'honorable Noël A. Kinsella : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, une version révisée d'un rapport intitulé Visite de l'honorable Noël A. Kinsella, Président du Sénat, et d'une délégation en Slovaquie, au Saint-Siège, à l'Ordre souverain militaire de Malte et en Italie, du 14 au 20 octobre 2010.

Est-ce que la permission est accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Projet de loi instituant la Journée nationale de la philanthropie

Présentation du cinquième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie

L'honorable Kelvin Kenneth Ogilvie, président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présente le rapport suivant :

Le jeudi 1er décembre 2011

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a l'honneur de présenter son

CINQUIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-201, Loi instituant la Journée nationale de la philanthropie, a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 6 octobre 2011, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
KELVIN K. OGILVIE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi pour la troisième fois?

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)b) du Règlement, je propose que la troisième lecture du projet de loi soit inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des vois : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Mercer, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour la présente séance.)

[Traduction]

L'Industrielle Alliance Pacifique, Compagnie d'Assurances Générales

Projet de loi d'intérêt privé—Présentation du septième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L'honorable John. D. Wallace, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 1er décembre 2011

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-1002, Loi autorisant l'Industrielle Alliance Pacifique, Compagnie d'Assurances Générales, à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 29 novembre 2011, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis

Le président,
JOHN D. WALLACE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la troisième fois?

L'honorable Michael A. Meighen : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)b), je propose que le projet de loi soit lu pour la première fois plus tard aujourd'hui.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Meighen, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

Finances nationales

Avis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Irving Gerstein : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, jusqu'au 31 décembre 2011, pour les fins de son étude du projet de loi-C-13, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget de 2011 mis à jour le 6 juin 2011 et mettant en œuvre d'autres mesures, le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à se réunir même si le Sénat siège à ce moment-là, l'application de l'article 95(4) du Règlement étant suspendue à cet égard.

Pêches et océans

Avis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à siéger à 17 heures le mardi 6 décembre 2011 et à 17 heures le mardi 13 décembre 2011, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'article 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.


ORDRE DU JOUR

La Loi sur la sécurité ferroviaire
La Loi sur les transports au Canada

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Nicole Eaton propose que le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire et la Loi sur les transports au Canada en conséquence, soit lu pour la troisième fois sous sa forme modifiée.

— Honorables sénateurs, je suis heureuse de présenter le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire et la Loi sur les transports au Canada en conséquence, à l'étape de la troisième lecture.

Les sénateurs se souviendront peut-être que j'ai moi-même présenté ce projet de loi le 2 novembre. J'espérais beaucoup, et j'étais passablement sûre, que les sénateurs reconnaîtraient d'emblée l'importance nationale de ces modifications à la Loi sur la sécurité ferroviaire.

Notre système ferroviaire est l'épine dorsale de notre économie depuis l'époque de la Confédération. Nous devons apporter des modifications législatives opportunes et progressistes comme celles- ci pour que notre industrie ferroviaire demeure un élément sûr et fiable de notre infrastructure nationale pour bien des années encore.

Le projet de loi S-4 est manifestement un progrès pour le Canada. Il est une amélioration de la sécurité des Canadiens et du bien-être de nos collectivités. Il est aussi avantageux sur le plan de la protection de l'environnement et il permettra de revigorer tant l'économie que l'industrie ferroviaire.

Ce sont autant de choses qui me tiennent beaucoup à cœur, et je suis très heureuse de dire que mon espoir et ma confiance du mois dernier n'ont pas été vains car ces modifications proposées ont reçu récemment un appui retentissant de la part des membres du Comité sénatorial permanent des transports et des communications et des nombreux intéressés qui ont témoigné devant le comité pour répondre aux questions et faire part de leur point de vue. Tous les témoins ont exprimé leur appui à cet important projet de loi visant à nous donner un Canada plus sûr.

Le projet de loi S-4 est sans aucun doute un bon projet de loi solide, qui a une grande portée mais une cible très précise. Il est le produit de plusieurs années de consultations. Il règle les problèmes de l'industrie ferroviaire sur le plan de la sécurité en proposant des solutions innovatrices et pragmatiques qui s'appuient sur des succès passés et ouvrent la porte à un succès constant pour l'avenir.

(1400)

Ce projet de loi visant à améliorer la sécurité ferroviaire améliorera aussi la vigueur de notre économie et la sécurité de notre population. Il est, de toute évidence, un projet de loi que nous pouvons tous appuyer, quelle que soit notre allégeance politique ou nos convictions personnelles. Il n'y a rien de plus important que notre sécurité, nos collectivités et notre prospérité dans ce beau territoire vert et fertile, mais fragile, qui est le nôtre.

Avant d'aller plus loin, je voudrais rappeler brièvement aux sénateurs l'origine du projet de loi et expliquer quelques-unes des modifications les plus importantes qui aideront à améliorer la sécurité dans tout le secteur ferroviaire. Certains sénateurs se rappelleront peut-être les noms de localités comme Wabamun, en Alberta, et Cheakamus et Lillooet, en Colombie-Britannique. Il y a juste cinq ans, en 2006 et 2007, ces endroits étaient dans tous les journaux nationaux, parce qu'ils ont été la scène de terribles accidents ferroviaires qui ont emporté des vies et causé un tort catastrophique à l'environnement. À Wabamum, plus d'un million de litres de mazout brut se sont répandus dans un paradis de villégiature au bord de l'eau. À Cheakamus, 40 000 litres de soude caustique se sont déversés dans la rivière, tuant près d'un million de poissons de 10 espèces différentes, dont des saumons quinnats, des saumons cohos, des saumons roses et des truites arc-en-ciel d'eau douce et de mer. À Lillooet, une locomotive et des wagons plats ont quitté la voie et ont fait une chute de 300 mètres dans le canyon du Fraser, entraînant la mort de deux membres de l'équipage et blessant sérieusement le mécanicien.

Ce sont ces accidents tragiques et plusieurs autres qui ont fait ressortir l'urgent besoin d'étudier les questions de sécurité dans tout le secteur ferroviaire canadien. En 2007, le ministre a chargé un comité de quatre personnes de faire une étude approfondie de la Loi sur la sécurité ferroviaire et de déceler les lacunes de la loi. Le comité a par la suite commandé divers travaux de recherche indépendants et mené de vastes consultations dans tout le Canada pour que les sociétés ferroviaires, les syndicats, les gouvernements, les municipalités, les expéditeurs et les particuliers puissent tous présenter leur point de vue sur les questions de sécurité ferroviaire. Ces larges consultations ont mené à la publication du rapport final du comité, intitulé Renforcer les liens : un engagement partagé pour la sécurité ferroviaire, qui a été déposé au Parlement en mars 2008. Ce rapport complet et très détaillé contenait 56 recommandations visant à améliorer la sécurité ferroviaire au Canada.

Honorables sénateurs, je voudrais signaler, si on me le permet, que le rapport final du comité sur la sécurité ferroviaire est tenu en haute estime et a mérité beaucoup de louanges de la part du gouvernement et de l'industrie.

Au cours des audiences du Comité sénatorial permanent des transports et des communications sur le projet de loi S-4, la semaine dernière, Cliff Mackay, président-directeur général de l'Association des chemins de fer du Canada, a exprimé l'avis que la direction du comité consultatif avait été exceptionnelle et que le rapport final assorti de recommandations était l'un des meilleurs qu'il ait jamais vus. Voilà de beaux éloges de la part du dirigeant principal d'une organisation qui représente environ 99 p. 100 des chemins de fer au Canada.

Pour ma part, je suis de même avis que M. Mackay et il semblerait que les membres du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes le soient aussi. Après avoir réalisé sa propre étude approfondie de la sécurité ferroviaire au Canada, en 2008, le comité permanent a accepté les 56 recommandations issues de l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire et a ajouté 14 autres de son cru pour améliorer encore la sécurité ferroviaire. Les modifications proposées dans le projet de loi S-4 donnent suite aux recommandations de ces deux examens de la sécurité. Les examens ont cerné les problèmes; le projet de loi S-4 apporte les solutions.

En somme, le projet de loi S-4 est un plan qui vise à assurer la sécurité à long terme dans l'un de nos secteurs d'activités les plus indispensables. Il modernisera de façon appréciable l'actuelle Loi sur la sécurité ferroviaire pour tenir compte de l'évolution du secteur et assurera une surveillance et des mesures d'exécution plus strictes pour que les exigences en matière de sécurité soient respectées. Les éléments clés du projet de loi et ses avantages sont clairs.

D'abord et avant tout, le projet de loi S-4 donnera à Transports Canada une capacité renforcée de surveillance et d'exécution en prévoyant des certificats d'exploitation de chemin de fer basés sur la sécurité et des pénalités pécuniaires pour les manquements en matière de sécurité, et en augmentant les sanctions ainsi que les pénalités judiciaires existantes pour qu'elles correspondent à ce qu'on observe pour d'autres modes de transport. Les certificats d'exploitation de chemin de fer basés sur la sécurité qui sont proposés feront en sorte que tous les chemins de fer de ressort fédéral aient en place un système efficace de gestion de la sécurité. Les pénalités administratives pécuniaires et les sanctions plus lourdes seront pour Transports Canada un arsenal de moyens plus efficaces pour gérer les sociétés qui s'entêtent à violer les règles de sécurité.

Le projet de loi insiste aussi beaucoup plus sur l'importance des systèmes de responsabilisation et de gestion de la sécurité, ce que l'industrie et les syndicats approuvent et appuient. Grâce à ces modifications, les sociétés ferroviaires seront tenues de nommer un gestionnaire supérieur responsable de toutes les questions de sécurité. Elles seront également tenues d'assurer une protection aux employés qui dénoncent des problèmes de sécurité. Ces modifications assureront non seulement une meilleure protection contre les accidents et les négligences, mais favoriseront aussi l'épanouissement d'une culture de la sécurité vigoureuse et durable dans le secteur ferroviaire.

Sur le plan administratif, le projet de loi S-4 comble des lacunes de la loi existante en précisant les pouvoirs du ministre en matière de sécurité ferroviaire. Il accroît également les pouvoirs de réglementation qui, et cela revêt une importance particulière, permettront à Transports Canada d'exiger des chemins de fer des plans annuels de gestion de l'environnement, et de les obliger à apposer des étiquettes indiquant les émissions sur le matériel et à produire des données sur les émissions pour examen.

Voilà, en bref, ce que prévoit le projet de loi sur la sécurité ferroviaire renforcée : une meilleure surveillance, de meilleurs moyens d'exécution, de meilleurs systèmes de gestion de la sécurité et une meilleure protection de l'environnement. Ce sont autant d'éléments dont nous avons besoin et dont nous nous félicitons. Les honorables sénateurs conviendront probablement que ce sont là des mesures que nous pouvons tous appuyer.

Comme les sénateurs le savent, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a écouté les parties en cause et effectué une étude article par article ces dernières semaines. Je suis très heureux de dire à mes collègues que le projet de loi S-4 a été adopté à l'unanimité au comité, avec un seul petit amendement qui portait sur la production de rapports par les employés.

Le projet de loi S-4 comprenait au départ une disposition qui aurait permis aux employés de signaler des violations en matière de sécurité au Bureau de la sécurité des transports, mais un certain nombre de témoins, dont ceux de Teamsters Canada, des chemins de fer et de Transports Canada ont fait remarquer que ce bureau n'avait pas été consulté et qu'un processus de déclaration directe des violations en matière de sécurité à Transports Canda existait déjà.

Personne ne voit d'inconvénient au mécanisme actuel de présentation de rapports et personne ne s'oppose à son maintien. L'appui sans réserve de Teamsters Canada à cet amendement particulier reflète l'importance que les travailleurs du rail attachent au rapport confidentiel présenté par les employés. Il est encourageant de noter la confiance qu'ils accordent à Transports Canada et leur conviction que le ministère peut les aider à régler les problèmes de sécurité au travail qu'ils signalent.

Comme je l'ai mentionné, le comité a entendu un certain nombre de témoins, dont les Teamsters, les chemins de fer, la Ville d'Ottawa et Transport Action Canada, qui ont tous appuyé le projet de loi. L'industrie ferroviaire, qui a exprimé à maintes reprises son appui au projet de loi, a proposé plusieurs ajouts que le comité a examinés. Même si nous comprenons et partageons même les préoccupations de l'industrie, je voudrais donner un bref aperçu des raisons pour lesquelles le comité n'a pas donné suite à ces propositions.

Les chemins de fer s'inquiètent beaucoup de l'aménagement de nouveaux lotissements à proximité des voies ferrées et des conséquences pour la sécurité. C'est une importante préoccupation que nous partageons tous. Toutefois, l'aménagement du territoire relève de la compétence des provinces et des municipalités. Par conséquent, le ministre a des pouvoirs limités quand il s'agit de mettre en vigueur des exigences relatives soit à des consultations soit à des notifications concernant l'aménagement de terres provinciales ou municipales.

La Loi sur la sécurité ferroviaire prévoit une exception qui permet au gouvernement fédéral de réglementer des activités et des travaux de construction et d'entretien, de restreindre l'accès et de faire enlever des objets sur des terres directement attenantes à l'emprise du chemin de fer. Nous estimons que l'aménagement du territoire dans tout contexte plus vaste relève de la compétence provinciale ou municipale. Nous encourageons les chemins de fer à régler cette question avec les autorités provinciales compétentes.

La sécurité des passages à niveau constitue également un problème pressant pour les chemins de fer. Nous comprenons leurs préoccupations à ce sujet, mais l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire n'a pas abouti à des recommandations visant des modifications législatives à cet égard.

(1410)

Le comité a cependant recommandé que Transports Canada élabore un programme, de concert avec les chemins de fer et d'autres intervenants, pour déterminer les passages à fermer, limiter le nombre de nouveaux passages et améliorer la sécurité à ceux qui existent actuellement. Nous notons que des travaux sont en cours dans ce domaine et que Transports Canada et l'Office des transports du Canada ont signé un protocole d'entente destiné à préciser leurs rôles respectifs, à apporter des améliorations au système et à adapter leurs activités et leurs procédés respectifs pour appuyer la sécurité aux passages à niveau et favoriser leur fermeture, le cas échéant.

De plus, le Groupe de travail sur la proximité et les opérations, qui comprend des représentants de l'industrie, des syndicats et de Transports Canada, élabore actuellement des stratégies et des objectifs en vue d'un bon programme de fermeture de passage. En fin de compte, la création de nouveaux passages à niveau relève exclusivement de l'Office des transports du Canada, en vertu de la Loi sur les transports au Canada. Nous estimons qu'un projet de loi sur la sécurité ferroviaire ne peut pas comprendre des modifications à la Loi sur les transports au Canada. Nous recommandons à l'industrie d'aller de l'avant dans ce domaine lorsque que des modifications de cette loi seront envisagées.

La troisième modification que l'industrie a proposée au comité était de changer la définition du niveau de sécurité le plus élevé. Selon le projet de loi S-4, ce niveau correspond au niveau de risque le plus bas qui soit acceptable selon une analyse de risque. C'est là une définition claire, qui est conforme aux principes et aux pratiques des systèmes de gestion de la sécurité.

L'industrie croit que le niveau de sécurité le plus élevé possible conviendrait mieux. Je ne suis pas de cet avis. Il est entendu que nous voulons que les chemins de fer fassent de leur mieux. Toutefois, la définition prévue dans le projet de loi S-4 leur donne la responsabilité de démontrer qu'ils ont fait de leur mieux. C'est là que réside la force de l'amendement existant. Le comité permanent a également eu le plaisir d'entendre des représentants de la Ville d'Ottawa, qui a demandé à Transports Canada de conclure une entente d'autorisation lui permettant de réglementer elle-même la sécurité du système de trains légers qu'elle se propose de réaliser. Avec une telle entente, ce système cesserait d'être un chemin de fer sous réglementation fédérale. Par conséquent, il ne pourrait pas profiter de la législation fédérale permettant au gouvernement d'exproprier des terres fédérales à l'usage du système. Nous nous sommes alors demandé ce qui suit : si la Ville d'Ottawa a accès aux lois d'expropriation provinciales, pourquoi aurait-elle besoin aussi des lois fédérales équivalentes? Lorsqu'elle a demandé à réglementer son système de trains légers, la ville n'a-t-elle pas pensé que le régime fédéral présentait des avantages dont elle ne pourrait pas se prévaloir dans le cas d'un chemin de fer ne relevant pas de la réglementation fédérale? Il semble que la ville ne s'intéresse à la réglementation fédérale que lorsque c'est commode pour elle de le faire.

Honorables sénateurs, nous sommes saisis d'un projet de loi qui compte parmi les plus progressistes qui soient et qui a fait l'objet des consultations les plus étendues. Un projet de loi similaire a été étudié en profondeur et a été approuvé à l'unanimité par le comité permanent de l'autre endroit avant le déclenchement des élections du printemps dernier. Il a également été approuvé à l'unanimité par notre comité permanent, à part l'amendement mineur que j'ai mentionné.

Le projet de loi S-4 est, de toute évidence, une bonne mesure législative pour les Canadiens, pour les collectivités et pour les chemins de fer. C'est un projet de loi important pour le Canada et il mérite votre appui.

Je voudrais conclure en disant que, à défaut des modifications de la sécurité ferroviaire proposées dans le projet de loi, la capacité du gouvernement de réglementer efficacement les compagnies ferroviaires dans un environnement de croissance continue qui se caractérise par une complexité croissante sera sérieusement affaiblie. Les améliorations de la surveillance réglementaire de Transports Canada et des programmes d'exécution seraient limitées, de même que les nouvelles initiatives de sécurité touchant les systèmes de gestion de la sécurité et la gestion environnementale.

Le cadre législatif applicable aux chemins de fer ne concorderait toujours pas avec celui des autres moyens de transport, qui bénéficient d'une gamme d'outils d'application plus complète. Il ne serait pas possible d'accroître les pouvoirs des autorités réglementaires de manière à mettre en place des certificats d'exploitation fondés sur la sécurité et à renforcer la protection environnementale.

Si les honorables sénateurs n'appuient pas ce projet de loi, cette situation continuera d'entraîner des décès, des blessures graves et des dommages aux biens et à l'environnement, ce qui fera grimper les coûts à long terme pour le gouvernement, les Canadiens et les sociétés ferroviaires. Honorables sénateurs, il faut empêcher que cela ne se produise.

J'aimerais tout d'abord remercier le sénateur Mercer de sa contribution au processus d'étude de ce projet de loi au Sénat et au comité. J'aimerais aussi remercier mes collègues du comité permanent, qui ont déployé beaucoup d'efforts afin que ce projet de loi puisse franchir les étapes le plus rapidement possible.

Je crois que l'amendement mineur qu'ils ont appuyé donne plus de force à cette mesure législative. J'encourage les honorables sénateurs à voter en faveur de ce projet de loi. Avec votre soutien, nous pourrons faire un grand pas en avant afin de rendre les chemins de fer plus sûrs et de protéger les Canadiens et l'environnement du Canada.

(Sur la motion du sénateur Mercer, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux

Troisième lecture

L'honorable Nancy Ruth propose que le projet de loi S-2, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves, tel que modifié, soit lu pour la troisième fois.

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour vous parler du projet de loi S-2, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves.

En mai et juin 2010, le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a étudié le projet de loi S-4, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux. Ce projet de loi S-4 était identique à d'autres projets de loi antérieurs, soit le projet de loi C-8, présenté au cours de la deuxième session de la quarantième législature, et le projet de loi C-47, présenté au cours de la deuxième session de la trente- neuvième législature.

Le comité a fait rapport du projet de loi S-4 au Sénat avec des propositions d'amendement et le projet de loi amendé a été adopté par le Sénat le 6 juillet 2010. Le projet de loi S-2, version révisée de ce projet de loi, a été présenté le 28 septembre 2011, et le comité a de nouveau été saisi de la question des biens immobiliers matrimoniaux.

L'engagement que le comité a pris de corriger ce qui a été décrit comme un « vide juridique » dans les réserves remonte à 2003, lorsqu'il a étudié la question pour la première fois et publié un rapport provisoire intitulé Un toit précaire : les biens matrimoniaux situés dans les réserves. Le comité a compris l'urgence de la situation vécue par les femmes de certaines collectivités des Premières nations au sommet de la rupture de leur relation et a demandé l'adoption d'une solution législative pour régler certaines des injustices à cet égard.

[Traduction]

Honorables sénateurs, quand la plupart des Canadiens sont confrontés à la fin d'une relation conjugale ou au décès de leur époux ou de leur conjoint de fait, ils bénéficient d'une protection juridique qui vise à assurer une répartition équitable des biens immobiliers matrimoniaux. Malheureusement, les personnes qui vivent dans les réserves régies par la Loi sur les Indiens n'ont pas droit à une telle protection. Pour ces hommes et ces femmes, le décès du conjoint ou la fin d'une relation signifie souvent qu'ils se retrouvent sans abris, sans ressources financières et dans un état d'insécurité. Ces situations se produisent parce que la Loi sur les Indiens ne contient aucune disposition régissant les droits relatifs aux biens immobiliers matrimoniaux, et qu'aucune autre mesure législative ne comble ce vide.

(1420)

[Français]

Le projet de loi S-2 constitue la quatrième tentative de nos gouvernements de combler le vide juridique actuel et d'offrir aux peuples des Premières nations les mêmes protections que celles que nous tenons bien souvent pour acquises.

Honorables sénateurs, après avoir étudié en profondeur ce projet de loi au comité, je veux affirmer que cette mesure législative a éveillé l'espoir chez plusieurs membres des Premières nations.

[Traduction]

En juin 2010, lorsque le Comité sénatorial permanent des droits de la personne étudiait le projet de loi S-4 portant sur les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves, nous avons entendu le témoignage du député, John Duncan, qui est actuellement le ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien.

Dans ses observations, il a dit :

Adopter le projet de loi est la bonne décision à prendre pour trois raisons. D'abord, le projet de loi offre aux résidents des communautés des Premières nations un niveau de protection semblable à celui qui est offert au reste de la population canadienne. Ensuite, il permet aux communautés des Premières nations de concevoir et de mettre en œuvre des lois sur les biens immobiliers matrimoniaux qui sont adaptées à leurs cultures et à leurs traditions. Enfin, la solution immédiate et concrète offerte par le projet de loi S-4 s'appuie sur les travaux de recherche et les efforts de consultation considérables de groupes indépendants, dont des organisations autochtones nationales.

Bien que ce projet de loi vise en principe à offrir des garanties aux Autochtones, je crains qu'il n'atteigne pas le but recherché, et ce, parce que le projet de loi S-2 n'est pas accompagné des ressources nécessaires.

Honorables sénateurs, dans un discours que j'ai prononcé à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi, j'ai déclaré qu'un droit sans ressources n'est pas un droit. Quand nous essayons de donner aux Autochtones les mêmes droits que ceux dont jouissent le reste des Canadiens, il ne faut pas oublier que la situation des Autochtones est souvent complètement différente.

Durant notre étude du projet de loi S-2, le comité a entendu plusieurs témoins qui ont expliqué comment les femmes autochtones, plus particulièrement, se retrouvaient souvent dans des situations où elles devaient sacrifier leurs libertés et leurs droits individuels pour que leurs familles puissent avoir accès aux biens de premières nécessités.

Nous avons entendu le témoignage d'une femme du nom de Danalyn MacKinnon, qui a fourni l'explication suivante :

Il y a notamment la hiérarchie des besoins. Les gens consacrent leur temps à essayer de se trouver un logement. Quand j'ai rencontré mon époux dans une réserve, 27 personnes vivaient dans sa maison. Le logement, la nourriture, les soins aux enfants, l'eau — ce sont là des choses de première nécessité que nous tenons tous pour acquis. Les femmes, plus particulièrement, doivent s'assurer que ces choses élémentaires sont là pour leurs enfants.

Dans notre région, les pensionnats ont eu des effets dévastateurs dans les collectivités. Cela s'est traduit par un dysfonctionnement marqué dans la collectivité et dans les familles ainsi que par beaucoup de violence, qu'il s'agisse de mauvais traitements physiques ou sexuels. Ce sont les conséquences avec lesquelles les gens doivent composer.

Honorables sénateurs, je suis allée dans de nombreuses réserves lorsque j'étais présidente du groupe de travail sur la violence familiale de la Colombie-Britannique, en qualité de membre du comité de M. Mulroney sur la violence faite aux femmes et à titre d'avocate. À mon avis, il y a beaucoup à faire dans les réserves. Il nous faut absolument une loi pour aider ceux que nous pouvons aider en espérant qu'elle nous permettra à la longue d'aider plus de gens à rester dans les réserves. Toutefois, les autres problèmes, le manque de ressources et les besoins des collectivités, sont immenses pour quiconque y vit.

Honorables sénateurs, après avoir entendu Mme MacKinnon, j'ai appris que nous ne pouvions pas examiner les problèmes des Autochtones indépendamment les uns des autres. Nous devons avoir une vue d'ensemble. Nous devons nous demander si ceux qui ont besoin de cette loi auront accès aux ressources nécessaires pour qu'elle soit efficace. Par exemple, le projet de loi S-2 dépend beaucoup des cours provinciales, qui peinent à répondre aux besoins actuels, sans parler de ceux qui seront créés par ce projet de loi.

Durant son étude, le comité a pu entendre Mme Mary Eberts, qui est titulaire de la chaire Ariel F. Sallows des droits de la personne à la faculté de droit de l'Université de la Saskatchewan.

Lorsque je lui ai demandé si elle pensait que l'accès des femmes autochtones au système de justice serait difficile, elle a répondu :

[...] dans toutes les provinces et tous les territoires du Canada, que vous viviez ou non dans une réserve indienne, il est difficile pour les femmes d'avoir accès à la justice dans des situations de droit de la famille. Il y a eu des coupes radicales dans l'aide juridique et les services d'aide juridique pour les affaires de droit de la famille. On voit de plus en plus de gens se représenter eux-mêmes dans les tribunaux de la famille.

Ce genre de problème est encore plus fréquent quand on songe à la situation des femmes vivant dans les réserves. Elles ne bénéficient pas d'aide juridique pour les affaires relevant du droit de la famille et leur accès est encore plus limité du fait que, souvent, il n'y a pas d'avocats à proximité des réserves éloignées. Même quand les tribunaux criminels se rendent dans les réserves éloignés, tout le monde s'y rend en avion avec le juge.

Je suis bien placée pour parler de ces difficultés, puisqu'hier, mon fils, Azool Jaffer-Jeraj, qui est président de la Trial Lawyers Association of British Columbia, avait organisé une séance de sensibilisation pour les tribunaux provinciaux parce que les avocats de service cesseront leurs activités en Colombie-Britannique à partir de janvier.

L'accès à l'aide juridique n'est facile pour personne, et encore moins pour les Autochtones.

Où ces gens pourront-ils aller pour obtenir l'aide d'un avocat? Même s'ils habitent près d'une ville où il y a des avocats, comment vont-ils faire pour tous s'en trouver un? Même si l'argent n'était pas un problème, il serait quand même difficile de trouver assez d'avocats dans les régions avoisinantes de nombreuses collectivités qui pourraient s'occuper d'autant d'affaires relevant du droit de la famille.

Voici ce que m'a répondu Mme MacKinnon, à qui j'ai posé une question similaire :

En ce qui concerne l'accès aux avocats, on peut se dire que la taille de la région dans laquelle on vit équivaut à la taille de la France. En restant optimiste, il y a peut-être 15 ou 20 avocats qui font du droit de la famille. De ces 15 ou 20 avocats, il n'y en a probablement que la moitié qui accepterait de s'occuper des dossiers qui viennent de l'aide juridique.

Il faut penser aux distances à parcourir, au temps et aux ressources que ça représente pour les membres de la collectivité. Les gens n'ont tout simplement pas assez d'argent pour retenir les services d'un avocat privé.

C'est très difficile, mais c'est le seul recours possible en l'absence d'une loi. Avec une loi, on peut au moins en faire valoir les dispositions devant un tribunal si on réussit à accéder à ces autres ressources, mais sans ça, la loi n'est qu'un bout de papier sans valeur.

[Français]

Honorables sénateurs, au cours de notre étude du projet de loi S- 2, notre comité a entendu un certain nombre de femmes lui expliquer comment le projet de loi S-2 changerait leur vie. Bien que celui-ci semble apporter une protection, nous devons veiller à ce que ces femmes aient les ressources nécessaires pour pouvoir exercer leurs droits. Nous ne devons pas susciter les attentes des Autochtones pour ensuite les décevoir.

[Traduction]

La pénurie de logements dans les réserves est elle aussi inquiétante. Je m'occupe de la question depuis des années, ce qui m'a permis d'entendre nombre de témoignages déchirants de femmes qui avaient été expulsées de chez elles et qui n'avaient nulle part où aller. En cas de rupture conjugale, la pénurie de logements est l'une des principales raisons qui obligent les gens à quitter leur réserve. Il faut reconnaître le problème et le régler au moyen d'une approche exhaustive.

Lorsque notre comité a étudié le projet de loi S-2, nous avons appris à connaître la courageuse Rolanda Manitowabi, qui nous a fait part de ses problèmes et de ses expériences. Au cours de son témoignage, elle a expliqué être restée dans une relation difficile et tendue parce qu'elle n'avait nulle part où aller. D'ailleurs, même après sa rupture, Mme Manitowabi a continué à vivre durant six mois avec son ancien conjoint pour constater un jour, en rentrant à la maison, qu'il avait changé toutes les serrures, la laissant ainsi sans abri avec son fils, sans nulle part où aller.

Honorables sénateurs, c'est là la triste réalité de bien des Autochtones qui vivent dans une réserve. Or, ce qui est peut-être encore plus triste, c'est que le gouvernement a réduit de 127 millions de dollars le financement du logement des autochtones depuis 2008, soit avant même l'application du Plan d'action économique. Même s'il est méritoire que le gouvernement s'attaque en priorité aux problèmes liés aux biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves, il est fort troublant qu'il sabre en parallèle le financement du logement dans les réserves des Premières nations.

Honorables sénateurs, une question s'impose : où iront ces conjointes qui ont perdu leur logement?

Lorsque notre comité a étudié le projet de loi S-2, nous avons reçu un mémoire du grand chef Denise Stonefish, de l'Association of Iroquois and Allied Indians. Elle y met en lumière plusieurs problèmes, en particulier liés à l'autorité des gouvernements des Premières nations de créer et d'instaurer leurs propres lois relatives aux droits et aux intérêts matrimoniaux.

(1430)

Elle a déclaré ceci :

Le paragraphe 7(1) du projet de loi S-2 habilite les Premières nations à élaborer et à adopter leurs propres lois applicables à l'échec d'une relation conjugale ou au décès de l'un des époux. Toutefois, cette disposition ne tient pas compte du pouvoir que détiennent actuellement les nations membres de l'Association des Iroquois et des Indiens alliés d'adopter leurs propres lois en matière de droits ou d'intérêts matrimoniaux [...]

Puis, elle a ajouté ce qui suit :

Comme les Premières nations disposent de peu de fonds, voire aucuns, pour adopter des lois sur les droits et les intérêts matrimoniaux, à l'intérieur comme à l'extérieur de la portée du projet de loi S-2, bon nombre de gouvernements des Premières nations seront obligés d'avoir recours aux règles fédérales provisoires qui sont décrites aux articles 13 à 52.

Honorables sénateurs, il est évident que de plusieurs collectivités des Premières nations auront besoin d'un coup de main pour pouvoir adopter leurs propres lois en matière d'intérêts et de droits matrimoniaux. Devant notre comité, le ministre a indiqué à deux reprises qu'on créerait un centre d'excellence, qui agirait en tant que source d'information et de soutien pour les collectivités des Premières nations.

Au cours de notre étude, le ministre a fait la déclaration suivante au sujet du centre d'excellence proposé :

Nous prévoyons créer un centre d'excellence. Une organisation apolitique nationale des Premières nations fournirait des conseils non contraignants sur l'orientation du centre, dans des domaines comme la recherche et les activités liées à la mise en œuvre. Le comité consultatif devrait se composer d'intervenants clés issus notamment d'organisations autochtones, d'ONG, du centre d'excellence et du gouvernement du Canada.

La moitié du personnel serait constituée de femmes qui, en tant que conseillères, se pencheraient sur les inquiétudes des femmes.

Le concept d'un tel centre me réjouit. Cependant, je crains que l'approbation requise du Conseil du Trésor ne retarde la création de ce centre. En effet, on nous a dit que le ministre ne parlerait au Conseil du Trésor du centre d'excellence qu'une fois que le projet de loi aura été adopté.

Non seulement le centre d'excellence proposé n'a pas budget, mais, quand j'ai demandé des précisions au ministre à son sujet, à la réunion de notre comité, j'ai appris qu'il n'y aurait qu'un seul centre dans tout le pays et qu'on n'avait pas encore décidé où il serait établi.

Honorables sénateurs, il est évident que l'établissement de ce centre sera grandement retardé, car il n'a ni budget ni emplacement. Par conséquent, les collectivités des Premières nations qui cherchent peut-être impatiemment des outils qui faciliteraient leur processus législatif pourraient aussi voir leurs efforts retardés.

C'est pourquoi, au cours de l'étude article par article de ce projet de loi à la réunion du comité, j'ai proposé un amendement au paragraphe 56(2) afin que la période de transition prévue passe de un an à deux ans. Ainsi, le centre d'excellence pourrait être établi, et les collectivités des Premières nations auraient le temps d'élaborer leurs propres lois concernant les intérêts et les droits matrimoniaux. Ma proposition n'a pas été acceptée, mais j'espère que lorsque le projet de loi sera à l'autre endroit, la question de la période de transition de un an sera examinée de plus près.

Honorables sénateurs, au cours de l'étude du projet de loi au comité, nous avons entendu de nombreux Autochtones nous faire part de leurs préoccupations et nous sympathisons avec eux. Bien que ce projet de loi puisse sembler une solution et un filet de sécurité, nous devons nous rappeler que ses dispositions ne seront appliquées que si les ressources voulues sont en place.

Il est évident pour moi que nous avons augmenté les attentes de plusieurs Autochtones. Nous devons maintenant veiller à ne pas les décevoir de nouveau.

Honorables sénateurs, grâce à l'étude de notre comité, nous avons donné une voix aux personnes et aux organisations autochtones. Nous devons maintenant les écouter.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

Son Honneur le Président : Adoptée avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Projet de loi sur le libre choix des producteurs de grains en matière de commercialisation

Deuxième lecture

L'honorable Donald Neil Plett propose que le projet de loi C-18, Loi réorganisant la Commission canadienne du blé et apportant des modifications corrélatives et connexes à certaines lois, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, l'Ouest canadien attend ce jour depuis le 27 septembre 1943, quand la participation à la Commission canadienne du blé est devenue obligatoire. C'est un honneur pour moi d'être le sénateur qui parraine ce projet de loi qui amorcera une nouvelle ère d'emplois et de croissance pour l'Ouest canadien. Le gouvernement a promis aux agriculteurs de l'Ouest canadien qu'il défendrait leurs intérêts et qu'il veillerait à ce qu'ils ne soient plus traités comme des agriculteurs de seconde zone.

Nous leur avons également promis que cette mesure législative serait adoptée à temps afin qu'ils puissent avoir la certitude qu'ils pourront vendre comme ils le désirent ce qu'ils préparent cet automne et ce qu'ils sèmeront au printemps.

Les agriculteurs de l'Ouest savent que les marchés devront s'adapter, et ils ont besoin de beaucoup de temps pour se préparer à ces adaptations. De plus, la nouvelle entité de la Commission canadienne du blé aura besoin de temps pour avoir recours à des opérations de couverture et des contrats à terme et devenir l'acteur fondamental que nous savons qu'elle peut être. J'attends ce jour avec impatience.

Les agriculteurs canadiens sont des entrepreneurs et des innovateurs. Au cours des 50 dernières années, ils ont augmenté leur productivité de 300 p. 100. C'est un taux de croissance incroyable, qui ferait l'envie de n'importe quelle autre industrie. Alors que nos grands-parents et nos arrière-grands-parents produisaient de la nourriture pour 10 personnes, les agriculteurs actuels en produisent pour plus de 120. De nos jours, le secteur de l'agriculture représente 8 p. 100 du PIB au Canada. Il fournit un emploi sur huit et près de 40 milliards de dollars en exportations.

L'agriculture continue d'être un moteur de la relance économique au Canada en créant des emplois et en favorisant la croissance. Cela dit, même si ce secteur connaît beaucoup de succès depuis un siècle, il continue de devoir relever des défis importants. Récemment, nous avons appris que la planète comptait maintenant 7 milliards d'êtres humains et on s'attend à ce que ce nombre grimpe à 7,6 milliards d'ici 2020. Si l'on se fie à ces projections, le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire devra nourrir 68 millions de personnes de plus à chaque année. C'est un défi incroyable, surtout que les agriculteurs devront le relever en ayant des terres et des ressources en eau limitées.

Honorables sénateurs, ce n'est pas le moment d'imposer un fardeau supplémentaire à nos agriculteurs avec toutes sortes de règlements et de tracasseries administratives. Nous devons plutôt leur faciliter la tâche afin qu'ils puissent nourrir la planète, et c'est précisément l'objet du projet de loi C-18.

Les céréaliculteurs de l'Ouest canadien sont comme tous les autres gens d'affaires. Ils veulent prendre les bonnes décisions pour leurs exploitations. Ils décident déjà quoi planter et quand récolter. Ils décident du mode de commercialisation de leurs récoltes de canola et de légumineuses, de leurs pois, lentilles et fèves, de leur avoine et de bien d'autres produits de culture. Ils veulent pouvoir jouir de la même liberté pour leur blé et leur orge.

Honorables sénateurs, au cours des 60 dernières années, la loi a privé les producteurs de blé et d'orge de l'Ouest canadien du droit de diriger leurs entreprises à l'étape la plus importante, c'est-à-dire celle de la vente. Dans une société libre et démocratique, que faisons- nous lorsque les producteurs de l'Ouest canadien tentent de vendre leur blé sur le marché libre? Nous les jetons en prison.

Honorables sénateurs, je vous ai raconté une histoire il y a quelques jours, mais celle-ci mérite d'être répétée. Un jeune agriculteur de ma province, le Manitoba, produisait du blé destiné à la vente. Toutefois, à cause des mauvaises conditions de croissance et des conditions météorologiques défavorables cette année-là, un champignon s'est attaqué à sa récolte. Le blé qu'il avait produit avait des grains noirs et était de qualité inférieure. La Commission canadienne du blé a refusé de le vendre. Confronté au fait qu'il n'allait pas gagner d'argent cette année-là, et parce qu'il ne savait plus à quel saint se vouer, cet agriculteur a trouvé un acheteur aux États-Unis. Il a chargé son blé et est parti livrer son blé à l'acheteur américain. Il a été arrêté à la frontière, où il a expliqué sa situation. S'il ne vendait pas son blé, que la Commission canadienne du blé avait refusé, il allait faire faillite et perdre sa ferme. Les autorités canadiennes, non pas américaines, mais bien canadiennes, lui ont dit qu'il ne pouvait pas vendre son blé lui-même. Parce qu'il avait essayé de vendre son blé lui-même, du blé que la Commission canadienne du blé avait refusé, il a été emprisonné. Un agriculteur, honorables sénateurs, a été mis en prison pour avoir essayé de vendre le fruit de sa terre.

(1440)

Honorables sénateurs, lundi soir dernier, plus de 60 agriculteurs de l'Ouest canadien sont venus à Ottawa, à leurs frais, pour célébrer l'adoption du projet de loi C-18 par les députés de l'autre endroit. Au cours de la soirée, l'un des manifestants, Kenton Possberg, de Humboldt, en Saskatchewan, qui cultive quelque 15 000 acres de terre, m'a raconté l'histoire qui suit concernant ses deux fils, Spencer et Taylor, âgés respectivement de sept et cinq ans.

Spencer jouait avec un petit camion tirant une remorque, tandis que son frère jouait avec une voiture de police. Lorsque le père a demandé à ses fils : « À quoi vous jouez, les garçons? », Spencer lui a répondu : « Papa, je m'en vais aux États-Unis pour vendre mon blé, et Taylor me poursuit avec sa voiture de police pour me dire que la Commission du blé va me mettre en prison. »

Voilà une histoire fort révélatrice. Un enfant de sept ans a été capable de reconnaître l'injustice que les agriculteurs de l'Ouest canadien subissent depuis environ 70 ans.

Au moins 13 histoires similaires à celle que je viens de vous raconter, qui s'est passée au Manitoba, concernent des agriculteurs de l'Ouest canadien qui ont été accusés d'une infraction criminelle et condamnés à la prison pour avoir tenté de vendre eux-mêmes leur récolte de blé et d'orge. Honorables sénateurs, voilà qui rappelle le registre des armes à feu mis en œuvre par le gouvernement libéral qui nous a précédés et que les libéraux souhaitent aujourd'hui conserver pour faire des criminels des agriculteurs et des chasseurs de canard.

Honorables sénateurs, certains d'entre vous savent peut-être que j'ai grandi dans la petite localité de Landmark, au sud-est de Winnipeg. Ce nom n'évoque absolument rien de bien connu, mais Landmark se distingue du fait qu'elle est située exactement au centre du Canada. Pourquoi cette leçon de géographie, vous demandez- vous? Eh bien, depuis 1943, les règles du jeu ne sont pas les mêmes pour tous au Canada. Les agriculteurs vivant à l'Ouest de mon village natal n'ont pas le choix, ils sont forcés de vendre leur récolte de blé et d'orge par l'entremise d'un organisme exerçant un monopole, en l'occurrence la Commission canadienne du blé. Pourtant, les agriculteurs vivant à l'est de Landmark, en Ontario, sont libres de vendre leur blé eux-mêmes ou de s'adresser à un organisme de mise en commun pour ce faire. Cette situation n'a tout simplement pas de sens sur le plan commercial et elle donne lieu à une injustice à laquelle il faut remédier. Voilà pourquoi, honorables sénateurs, il est juste de dire que ce projet de loi marque un tournant.

Certains sénateurs d'en face n'ont pas raison d'afficher une attitude défaitiste et pessimiste et de dire que la nouvelle Commission canadienne du blé ne pourra pas survivre et qu'elle disparaîtra. Permettez-moi de citer des propos tirés de l'intervention que le sénateur Mitchell a faite il y a quelques semaines dans le cadre de son interpellation sur la Commission canadienne du blé :

Je sais que certains de ce côté-là vont dire que ce n'est pas le cas, mais la réalité c'est que la mesure législative va effectivement tuer la commission.

Les sénateurs de ce côté-ci croient non seulement que les agriculteurs de l'Ouest canadien sont capables de commercialiser leur grain de façon rentable, mais également que le système de mise en commun est viable et populaire dans de nombreuses régions de l'Ouest et que, par conséquent, la nouvelle Commission canadienne du blé peut survivre et qu'elle survivra.

En 2003, l'industrie du blé de l'Ontario a abandonné le guichet unique au profit du marché libre. Nous proposons la même formule pour les céréaliculteurs de l'Ouest dans le projet de loi sur le libre choix des producteurs de grains en matière de commercialisation. Depuis son passage au marché libre, l'industrie du blé de l'Ontario a connu une croissance substantielle. Aujourd'hui, en Ontario, les récoltes de blé totalisent 2 millions de tonnes et rapportent plus de 300 millions de dollars aux exploitations agricoles. Le blé est devenu l'une des principales denrées alimentaires exportées par la province et représente des exportations d'une valeur de plus de 280 millions de dollars.

En Ontario, un secteur dynamique et innovateur des produits à valeur ajoutée achète près de la moitié de la production ontarienne de blé pour fabriquer des produits alimentaires de grande qualité qui se retrouvent sur les tablettes des marchés d'alimentation ontariens. Depuis que leur marché est ouvert, les producteurs ontariens de blé ont exploité ces dernières années un certain nombre d'occasions passionnantes dans la production à valeur ajoutée.

Par exemple, les Grain Farmers of Ontario fournissent en blé ontarien une société ontarienne qui est devenue le plus grand fabricant de pitas au Canada. Voilà qui dément la propagande et la campagne de peur des libéraux, selon qui la fin du double régime de commercialisation ferait fuir aux États-Unis tout notre argent et nos investissements. Les projets comme ceux-là ont été une telle réussite que les GFO cherchent de nouveaux débouchés pour le maïs et le soya.

L'industrie ontarienne du blé montre ce qu'on peut faire lorsque tous les éléments de la chaîne de valeur travaillent de concert pour exploiter le potentiel du marché. Dans l'Ouest du Canada, l'histoire n'a pas été la même. Depuis 25 ans, les superficies consacrées à la culture des grains régis par la Commission canadienne du blé sont passées des trois quarts à environ la moitié de toutes les superficies ensemencées. Par contre, la part consacrée à la culture du canola a presque triplé. La part du marché du Canada sur les marchés mondiaux d'exportation de l'orge a diminué de 65 p. 100 depuis les années 1980, tandis que le secteur des légumineuses a réalisé des exportations de 2 milliards de dollars en 2010.

Honorables sénateurs, je suis certain que le projet de loi C-18 marquera le début d'un nouveau printemps pour le secteur du blé et de l'orge dans l'Ouest du Canada. La liberté en matière de commercialisation rendra possibles de nouveaux investissements dans la production à valeur ajoutée, de nouveaux emplois, et une nouvelle croissance pour l'économie de l'Ouest du Canada.

Depuis plus de 50 ans, ma famille exploite une entreprise florissante de plomberie, de chauffage et de ventilation à Landmark. Nous avons fait notre part pour fournir des emplois et assurer la croissance économique de notre région. Mes fils ne sont pas différents des autres hommes d'affaires, qu'ils soient plombiers, coiffeurs ou agriculteurs. Ils veulent être en mesure de prendre des décisions d'affaires cruciales, et ils ont besoin de cette capacité. C'est parce qu'on a sa destinée en main qu'on aime diriger sa propre entreprise au lieu de pointer quelque part pour faire du 9 à 5.

Dans ma seule province, la production de blé et d'orge est un moteur important de l'économie provinciale, car elle rapporte des recettes monétaires agricoles de près de 800 millions de dollars, et les exportations ont dépassé les 900 millions de dollars l'an dernier. Le ministre fédéral de l'Agriculture continue de travailler fort avec l'industrie pour faire augmenter encore ces ventes. Ensemble, ils ont ouvert dans le monde de nouveaux débouchés très intéressants pour le bœuf, le porc, les légumineuses et le canola, pour ne donner que quelques exemples. Plus tôt ce mois-ci, le ministre Ritz a annoncé que l'Organisation mondiale du commerce s'était prononcée en faveur du Canada à propos de l'exigence américaine d'étiquetage du pays d'origine. Voilà qui va certainement mettre sur un pied d'égalité les éleveurs du Manitoba et de tout le Canada.

Il faut aussi que nos producteurs de blé et d'orge se battent à armes égales. Les entrepreneurs agricoles d'aujourd'hui prouvent à répétition qu'ils peuvent et qu'ils vont aider à stimuler l'économie s'ils ont le contrôle de leur propre exploitation et de leurs résultats financiers.

Grâce à la liberté en matière de commercialisation, nous pouvons nous attendre à davantage d'innovation et à de nouvelles productions à valeur ajoutée. La disparition du monopole permettra aux agriculteurs manitobains de vendre directement leur grain au transformateur, que ce soit un fabricant de pâtes alimentaires, une minoterie, une brasserie ou une autre usine de transformation. Les entrepreneurs agricoles auront la possibilité d'ouvrir leur petite minoterie de spécialité ou leur usine de pâtes sans toutes les tracasseries administratives que cela entraîne maintenant. Ils n'auront pas à attendre qu'un organisme de l'extérieur leur dise, longtemps après la vente de leur grain, quel est le prix final de la vente.

Dans toutes les Prairies, il y a eu, ces 20 dernières années, une multiplication des débouchés dans la production à valeur ajoutée à partir de l'avoine, des légumineuses et du canola. Il n'y a aucune raison pour qu'il en aille autrement pour le blé, le blé dur et l'orge.

Au Manitoba seulement, la superficie consacrée à la culture de l'avoine a augmenté de 175 000 acres depuis que cette céréale a été retirée à la Commission canadienne du blé. Autant d'investissements et de profits pour le Canada. Dans les semaines qui ont suivi la décision, on a annoncé l'ouverture de deux nouvelles usines de transformation. Plusieurs autres usines ont été bâties à la fin des années 1980 et au début des années 1990, ce qui a profondément transformé le marché de l'avoine, amenant notamment Can-Oat à Portage la Prairie. Encore des investissements et des profits au Canada.

Juste de l'autre côté de la frontière, au Dakota du Nord, un grand nombre d'usines de pâtes ont poussé, faisant apparaître des emplois qui auraient pu être créés au Manitoba. Autant d'investissements et de débouchés ratés à cause de la commercialisation à comptoir unique. Nous observons déjà un regain d'intérêt pour les produits à valeur ajoutée, simplement grâce à la liberté en matière de commercialisation. Encore là, des investissements et des profits au Canada.

(1450)

Récemment, nous avons appris une nouvelle réjouissante : on prévoit ouvrir à Regina une nouvelle minoterie qui prendra du blé dur canadien l'an prochain. Des investissements et des profits au Canada. De plus, une installation albertaine de maltage de l'orge triplera sa capacité d'entreposage de l'orge. Encore des investissements et des profits au Canada.

Voilà les types d'industries à valeur ajoutée et d'emplois qui existent grâce à la liberté qui est laissée aux agriculteurs de commercialiser leurs produits à leur guise. Cela, avec l'augmentation des échanges commerciaux, pourrait créer de nombreux emplois qui compenseront ceux qui pourraient disparaître à la Commission canadienne du blé parce qu'elle devra s'adapter à son nouveau rôle. Il y aura aussi une nouvelle demande chez les agriculteurs qui chercheront de bons agents de commercialisation, des analystes des affaires et d'autres spécialistes du secteur des grains.

Au Manitoba et dans toutes les Prairies, l'ouverture du marché aura pour conséquence que plus d'acheteurs solliciteront les agriculteurs. Des investissements et des profits au Manitoba, qui en a bien besoin, compte tenu de son gouvernement néo-démocrate qui n'a aucune vision d'avenir.

À l'horizon, pour la première fois, le Minneapolis Grain Exchange acceptera du grain canadien pour livraison en échange de ses contrats à terme standardisés sur le blé. Encore une fois, honorables sénateurs, c'est du grain qui va aux États-Unis et de l'argent qui vient au Canada.

ICE Futures Canada, à Winnipeg, s'efforce de créer ses propres contrats à terme standardisés pour le blé de printemps et le blé dur de l'Ouest du Canada. C'est une annonce extraordinaire : les agriculteurs disposeront d'un important outil de gestion du risque pour le jour où ils auront le droit de commercialiser eux-mêmes leur production. Il y aura ainsi une plus grande transparence des prix au moment des semailles. Les agriculteurs pourront prendre des décisions plus éclairées sur ce qu'ils vont cultiver. Ils auront ainsi la souplesse voulue pour réagir rapidement aux signaux du marché. Il ne fait pas de doute que tout cela, ce sont de bonnes nouvelles pour le Manitoba et l'Ouest.

Nous savons qu'avec un changement de cette magnitude, des ajustements seront nécessaires. Il y aura en particulier une période de transition pour le port de Churchill, qui dépend largement des ventes de céréales de la Commission canadienne du blé.

J'ai une passion pour le port de Churchill, tout comme notre gouvernement, qui n'a jamais caché son intention de faire du Nord canadien une des pierres angulaires de notre programme. Lorsque la loi aura été adoptée, le port de Churchill restera une option importante pour le transport. Je suis heureux de pouvoir dire aujourd'hui que le gouvernement est en train de faire des investissements importants pour faciliter cette transition et pour aider le port à continuer d'être un centre viable pour expédier des marchandises en passant par le Nord.

Le gouvernement offrira des incitatifs pouvant atteindre 5 millions de dollars par année, sur une période de transition de cinq ans en vue de favoriser l'utilisation du port pour expédier des grains, y compris des oléagineux, des légumineuses et des cultures spéciales. Nous fournirons également une aide maximale de 4,1 millions de dollars sur trois ans pour l'amélioration de l'infrastructure et l'entretien du port au cours de la période de transition. De plus, on prolongera de deux ans, soit jusqu'en 2015, le délai pour achever les projets entrepris avec la Churchill Gateway Development Corporation.

Ces investissements importants sont un complément à d'autres investissements stratégiques que nous avons faits pour Churchill au cours des dernières années. Par exemple, l'année dernière, Transport Canada a affecté plus de 13 millions de dollars à l'amélioration de l'aéroport de Churchill, en plus d'exploiter cet aéroport et de subventionner le service de transport de passagers de Via Rail à destination de Churchill et de plusieurs autres endroits éloignés.

Depuis 2007, le gouvernement a aussi consacré 20 millions de dollars à l'amélioration du chemin de fer, 4 millions de dollars à l'amélioration du port et 1 million de dollars à la commercialisation et au développement des services du port. Nous continuerons de collaborer avec la province du Manitoba et avec d'autres acteurs du milieu pour trouver de nouvelles façons de développer le port de Churchill et d'en diversifier les activités, de manière à en assurer la prospérité au cours de la transition et à long terme.

Permettez-moi de souligner que le maire de Churchill est disposé à examiner les solutions qui s'offrent à sa municipalité pour l'avenir. Comme le rapporte le Red Deer Advocate, le maire de Churchill, M. Mike Spence, affirme être prêt à œuvrer pour la diversification de la clientèle du port sur la baie d'Hudson si, à partir du moins d'août prochain, la Commission canadienne du blé cesse de détenir le monopole du transport des céréales au Canada. Voici ce qu'a déclaré le maire Spence :

Je suis un optimiste. Je regarde toujours du côté positif et j'espère donc que nous pourrons expédier davantage de grain et que le port se diversifiera [...] Je crois que nous pouvons le faire.

Honorables sénateurs, c'est là le genre d'attitude positive et projetée vers l'avenir que tous les sénateurs libéraux auraient intérêt à adopter.

Le gouvernement du Manitoba résiste au changement, mais nous voyons des organisations d'agriculteurs, comme Keystone Agricultural Producers and Farmers of North America Inc. dire qu'elles veulent la liberté de mise en marché pour les agriculteurs.

Bob Friesen, agriculteur de longue date au Manitoba et ancien président de la Fédération canadienne de l'agriculture, a témoigné au nom de Farmers of North America devant le comité législatif de l'autre endroit. Ironiquement, M. Friesen est un témoin qui avait été proposé par l'opposition. Farmers of North America est une alliance commerciale mise sur pied à l'initiative d'un producteur de grain et d'oléagineux de Swift Current, en Saskatchewan. L'alliance compte 10 000 membres dans tout le Canada. Je souligne que tous ces agriculteurs ont adhéré à l'organisation volontairement. Le principal élément du mandat de l'alliance et sa priorité, c'est d'améliorer la compétitivité des agriculteurs et de maximiser leurs profits. Voici un passage du témoignage de M. Friesen, qui a été entendu le 1er novembre 2011 :

Loin de moi l'idée de vouloir galvauder une citation que nombre d'entre vous ont déjà entendue, mais Wayne Gretzky avait l'habitude de dire qu'il était bon au hockey parce qu'il allait où il savait que la rondelle serait lancée. Il n'allait pas où la rondelle se trouvait déjà. C'est la philosophie que nous adoptons à FNA. Nous voulons essayer de prévoir où la rondelle sera lancée pour nous en emparer en premier au nom des agriculteurs que nous représentons. Nous voulons nous assurer de servir de façon adéquate les intérêts supérieurs des agriculteurs.

Ses paroles m'ont intéressé. Il a déclaré que son groupe désire travailler avec la nouvelle organisation afin d'en faire une agence de mise en marché efficace qui peut offrir une option de mise en commun viable aux agriculteurs qui désireront travailler avec elle. M. Friesen a ajouté ceci :

Pour moi, ce soir, le débat est assez simple. Il y a beaucoup d'agriculteurs qui veulent continuer d'utiliser un organisme de commercialisation; il y a des agriculteurs qui veulent eux- mêmes commercialiser leurs produits.

Ce que nous disons, c'est que nous devons nous assurer de créer quelque chose de viable pour les agriculteurs qui veulent continuer de fonctionner de cette manière.

Je le répète, c'est le genre d'attitude positive tournée vers l'avenir qu'il faut pour que nous puissions offrir de nouvelles perspectives aux agriculteurs.

À l'instar de plusieurs sénateurs, j'ai discuté avec beaucoup d'agriculteurs, tant ceux qui sont en faveur que ceux qui sont contre. Peu importe le point de vue, l'objectif principal de ce changement est d'offrir aux agriculteurs canadiens plus de moyens de réussir sur le plan économique.

Les agriculteurs qui veulent avoir accès à un système de mise en commun continueront à avoir cette possibilité, par l'entremise de la Commission canadienne du blé à participation facultative. Dans les systèmes de libre choix en matière de commercialisation en vigueur pour d'autres grains, il existe déjà des systèmes de mise en commun. Il y a, entre autres, le North West Terminal, l'un des plus importants terminaux céréaliers dans les Prairies, appartenant à des agriculteurs. C'est une coopérative. Les agriculteurs sont libres d'adhérer à la coopérative et d'obtenir de l'aide pour commercialiser leur grain. Cependant, ceux qui estiment pouvoir mieux réussir en vendant leur production directement sur le marché en auront la possibilité. Pour moi, c'est cela, la vraie liberté, la vraie équité et le vrai respect des droits fondamentaux.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Le gouvernement a entendu le point de vue de nombreux entrepreneurs du secteur agricole qui estiment que leurs propres activités leur vaudront des succès plus éclatants s'ils disposent des choix que le projet de loi leur procure en matière de commercialisation.

Un groupe de travail largement représentatif a conclu, dans un rapport paru en septembre, que ce serait effectivement le cas. Le groupe a entendu le témoignage de 50 intervenants différents, notamment des producteurs, et a reçu plus de 20 mémoires. J'aimerais également souligner que, d'après le sondage réalisé par la Commission canadienne du blé elle-même, une majorité de producteurs était en faveur d'un système de commercialisation mixte ou de la libre commercialisation pour le blé. Les deux tiers d'entre eux ou presque, soit 58 p. 100 des producteurs de blé, ont déclaré vouloir un marché où la Commission canadienne du blé n'est pas présente ou être libres de faire affaire avec la Commission canadienne du blé. En fait, la plupart des producteurs ont opté pour le libre choix en matière de commercialisation, autrement dit le système de commercialisation mixte, lorsqu'on leur a demandé de choisir entre les trois options suivantes : ne pas apporter de changement à la Commission canadienne du blé, adopter un système de commercialisation mixte ou éliminer la Commission canadienne du blé.

(1500)

Henry Vos, ancien directeur de la Commission canadienne du blé qui a démissionné récemment et producteur céréalier de Fairview, en Alberta, a déclaré ce qui suit au magazine Maclean's :

Pierre Trudeau a déjà dit que l'État n'a rien à faire dans la chambre à coucher des Canadiens.

L'État peut-il davantage se mêler de ce qui se passe dans les champs de céréales et les silos à grains des agriculteurs canadiens?

Des voix : Non.

Le sénateur Plett : De toute évidence, les agriculteurs de l'Ouest du Canada s'entendent pour dire que l'on aurait dû leur laisser le choix de commercialiser leur grain comme ils l'entendent et que l'on devrait encore leur laisser ce choix aujourd'hui. Les agriculteurs ne devraient pas être contraints de dépendre de la commission ou du gouvernement pour vendre leurs récoltes, que ce soit à Landmark, au Manitoba, ou en Nouvelle-Écosse. Dans une société libre et démocratique, une société fondée sur la libre entreprise, si ne serait- ce qu'un seul producteur céréalier veut avoir le libre choix en matière de commercialisation, pourquoi devrions-nous l'en empêcher?

L'opposition a fait grand cas du plébiscite tenu par la Commission canadienne du blé, plus particulièrement du pourcentage des agriculteurs qui sont favorables au régime de commercialisation à guichet unique. À cet égard, permettez-moi de dire ce qui suit : la question inscrite sur le bulletin de vote du plébiscite sur le blé donnait deux choix, à savoir :

A) Je souhaite continuer de commercialiser tout le blé par l'entremise du régime à comptoir unique de la CCB, toujours à l'exception du blé fourrager vendu sur le marché intérieur.

B) Je souhaite abolir le régime à comptoir unique de la CCB et vendre tout le blé sur un marché libre.

La question inscrite sur le bulletin de vote du plébiscite sur l'orge donnait deux choix, en somme identiques à ceux qui avaient été offerts pour le blé. Dans le cadre du plébiscite, on n'a jamais donné le troisième choix proposé dans le projet de loi C-18, à savoir celui de maintenir la Commission canadienne du blé comme mécanisme de commercialisation de grains par voie de mise en commun tout en permettant aux agriculteurs de commercialiser leurs produits eux- mêmes s'ils le préfèrent.

La Western Canadian Wheat Growers Association a déclaré ce qui suit au sujet du plébiscite :

La CCB affirme que des bulletins de vote ont été envoyés à plus de 68 000 électeurs. Toutefois, selon les chiffres de Statistique Canada, il n'y a pas plus de 20 000 exploitations commerciales productrices de grain dans l'Ouest du Canada.

Le grand nombre d'électeurs admissibles montre que certaines exploitations ont reçu de nombreux bulletins et qu'un grand nombre d'agriculteurs amateurs ou à la retraite ont pu voter.

Les sénateurs d'en face ont affirmé avec raison que le dépouillement des bulletins, après ce plébiscite biaisé, révélait que 62 p. 100 des agriculteurs appuyaient le maintien du guichet unique pour le blé, et que 51 p. 100 des agriculteurs l'appuyaient pour l'orge. Toutefois, le plébiscite qui compte vraiment et qui est vraiment précis, c'est celui qu'on a tenu le 2 mai 2011.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Les gens d'en face laissent entendre que le gouvernement a remporté la victoire avec seulement 39 p. 100 des votes et que cela correspond, d'une manière ou une autre, au taux d'appui au projet de loi C-18 au sein de la population. Ce n'est tout simplement pas le cas, comme je vais le démontrer avec les chiffres suivants sur l'appui des électeurs des régions rurales de l'Ouest.

Mon bon ami et collègue le sénateur Finley a rapporté la semaine dernière au Sénat quelques chiffres concernant les pourcentages de votes aux dernières élections, des chiffres se rapportant précisément à certaines circonscriptions. Je vais à mon tour présenter aux sénateurs des résultats relatifs aux provinces les plus intéressées par la question de la Commission canadienne du blé. En Colombie- Britannique, l'appui aux conservateurs a été de 62,1 p. 100, et l'appui au Parti libéral a été de 5,2 p. 100. En Alberta, on constatait un appui de 77,58 p. 100 aux conservateurs, et de 4,5 p. 100 en faveur des libéraux. En Saskatchewan, c'était 68 p. 100 pour les conservateurs, et 5,05 p. 100 pour les libéraux et, au Manitoba, 67,72 p. 100 pour les conservateurs et 5,96 p. 100 pour les libéraux. C'est vraiment fascinant de voir ce que cela rapporte d'écouter les électeurs et de tenir ses promesses.

Les sénateurs libéraux devraient aussi remarquer que, aux élections du 2 mai, dans la circonscription de Wascana, qui est représentée par Ralph Goodale, le candidat conservateur a obtenu une majorité dans tous les bureaux de scrutin des régions rurales.

Le gouvernement a conçu un plan global qui assurera une transition sans heurts vers le marché libre. Le projet de loi permettrait au gouvernement d'offrir à la Commission canadienne du blé le soutien voulu pour qu'elle puisse maintenir ses services en tant qu'organisme de commercialisation à participation volontaire, le temps qu'elle s'organise en société entièrement privée. Nous travaillerons avec la commission pour assurer une transition aussi rapidement que possible. Cela permettra aux agriculteurs et à l'ensemble des intéressés à tous les échelons de la chaîne de valeur de planifier et d'adapter leur fonctionnement sans inquiétude.

Comme l'innovation revêt une importance capitale pour l'avenir de l'industrie céréalière canadienne, le projet de loi prévoit aussi un mécanisme de financement à participation facultative pour soutenir la recherche et le développement des marchés. Le projet de loi prévoit que sa mise en œuvre se fera en plusieurs étapes afin de donner aux producteurs et à la chaîne de valeur la certitude et la clarté dont ils ont besoin pour faire la transition vers le libre marché.

Le projet de loi comporte cinq parties. Pour le bénéfice des sénateurs d'en face qui n'ont pas lu la mesure législative, mais qui s'en sont fait une opinion très claire, bien qu'erronée, je vais les passer en revue toutes les cinq. La première partie vise la période qui va de la sanction royale jusqu'à la date de transition au libre choix en matière de commercialisation. La date n'est pas mentionnée dans le projet de loi, mais le gouvernement a dit très clairement que ce serait le 1er août 2012.

Dans cette première partie, la structure de gouvernance de la Commission canadienne du blé est modifiée afin de permettre une plus grande collaboration et de faire en sorte que la commission se concentre sur le nouvel environnement en matière de commercialisation. Le conseil nommé va continuer d'administrer les mises en commun de cette année. Tous les participants seront libres de conclure des contrats à terme pour la vente de blé et d'orge livrés après le 1er août 2012.

Le projet de loi a été modifié afin de permettre à la Commission canadienne du blé de conclure des contrats à terme pour d'autres céréales que le blé et l'orge. Les autres éléments importants de la Loi sur la Commission canadienne du blé demeurent inchangés durant l'étape préliminaire.

En vertu de la deuxième partie, qui vise la période postérieure au 1er août 2012, la Loi sur la Commission canadienne du blé serait abrogée et remplacée par la Loi sur la Commission canadienne du blé (activités en période intérimaire). Le monopole serait alors éliminé, et n'importe qui pourrait vendre et acheter n'importe quelle céréale. Autrement dit, les producteurs ne seraient plus tenus de vendre leurs récoltes par l'intermédiaire de la Commission canadienne du blé.

En vertu de cette mesure législative intérimaire, la Commission canadienne du blé continuerait d'offrir un service de mise en commun, et le gouvernement assumerait les paiements initiaux et fournirait les garanties de financement requises pendant une période pouvant atteindre cinq ans. Afin de lui donner une assise plus solide, la commission pourrait commercialiser diverses récoltes au Canada et dans le monde entier.

Il y aura des coûts de transition lorsque la Commission canadienne du blé va s'adapter à son nouveau rôle d'organisme de commercialisation à participation facultative. Le gouvernement a l'intention d'aider à assumer ces coûts, afin que les producteurs ne soient pas pénalisés indûment. Un prélèvement temporaire sera effectué au point de vente, afin de soutenir les investissements dans la recherche et le développement des marchés.

En vertu de la troisième partie du projet de loi, la Commission canadienne du blé intérimaire serait tenue, durant la quatrième année, d'élaborer un plan d'affaires dans lequel elle expliquerait comment elle entend s'y prendre pour se capitaliser et fonctionner comme une société privée. Le conseil d'administration serait tenu de présenter le plan en question, et la commission serait tenue de devenir une entité privée dans un délai de cinq ans. Elle pourrait se transformer en société par actions, en coopérative de producteurs ou en organisme sans but lucratif. La décision appartiendrait à la commission.

Si la commission n'est pas devenue un organisme privé dans les cinq ans, la partie 4 en prévoit la liquidation.

La partie 5 prévoit l'abrogation de la Loi sur la Commission canadienne du blé (activités en période intérimaire) et met fin à la période de transition.

Comme les sénateurs peuvent le constater, le gouvernement a choisi une démarche évolutive, qui donne amplement l'occasion à la Commission canadienne du blé d'offrir une solution de rechange intéressante aux producteurs de céréales en matière de commercialisation. Cette façon de procéder donnera le temps à tous les éléments de la chaîne de valeur de s'adapter au libre marché et, ce faisant, elle garantira des conditions plus stables aux agriculteurs de l'Ouest canadien pendant la période de transition.

Depuis le premier jour de la campagne électorale, honorables sénateurs, il était très clair que le libre choix en matière de commercialisation était un élément fondamental de la plateforme électorale du Parti conservateur. En retour, les Canadiens nous ont confié un mandat clair, accordé une solide majorité et chargés de respecter nos promesses. Tout comme les agriculteurs qui étaient ici cette semaine scellent leurs ententes par une poignée de main, le gouvernement a tendu la main aux agriculteurs de l'Ouest le 2 mai et ceux-ci ont contribué à faire élire un gouvernement conservateur majoritaire à Ottawa.

Au cours des dernières semaines, beaucoup de choses ont été dites pendant les délibérations au sujet de l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé. Plus particulièrement, le sénateur Moore, le sénateur Banks, le sénateur Mitchell et même le sénateur Cowan, récemment, ont tous posé des questions sur la légalité du projet de loi C-18. Pour répondre à leurs observations erronées, je tiens à leur dire ce qui suit.

Selon l'article 47.1 de la loi adoptée par les libéraux en 1998, le ministre de l'Agriculture ne peut pas modifier les règles régissant le guichet unique sans d'abord consulter la commission et permettre aux producteurs de céréales de se prononcer par vote.

(1510)

Honorables sénateurs, permettez-moi de dire que la suprématie du Parlement est l'un des principes fondateurs de la démocratie canadienne; celui-ci dispose du pouvoir suprême de légiférer sur toutes les questions non constitutionnelles. Il est donc généralement admis, sénateur Mercer, que les gouvernements précédents ne peuvent pas lier les mains des gouvernements futurs. Comme l'a dit la juge Karen Sharlow, l'article 47.1 « n'empêche pas le législateur d'adopter toute législation qu'il juge appropriée ». En outre, pour citer le sénateur libéral Joyal, le fait « [q]ue ce système fonctionne bien est en fait un acquis de la démocratie parlementaire ».

Voici la définition de la suprématie parlementaire, selon le juge Noël :

[...] le Parlement a le pouvoir discrétionnaire d'annuler l'application des arrêts de la Cour suprême. Le principe de la souveraineté du Parlement est une assise du droit constitutionnel canadien : les tribunaux doivent se conformer aux lois adoptées par le Parlement.

Pour sa part, le juge Murphy a dit que :

La souveraineté parlementaire, aussi appelée suprématie parlementaire, est la règle qui dit que le Parlement a le pouvoir de faire et de défaire toutes les lois, quelles qu'elles soient.

Honorables sénateurs, ce n'est pas la majorité du gouvernement qui nous donne le droit de modifier les lois; c'est la suprématie du Parlement. La majorité garantit simplement l'adoption d'un projet de loi.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Pour ce qui est de la consultation du ministre de l'Agriculture avec la Commission canadienne du blé et du vote des agriculteurs, cela a été fait. En effet, le 2 mai 2011, nous avons mené une consultation dont le résultat a été que la population, dans une très forte majorité, a décidé de faire confiance au Parti conservateur pour prendre la bonne décision et accorder aux agriculteurs de l'Ouest la liberté de choix.

Pour conclure, honorables sénateurs, dans un marché libre, les agriculteurs qui ont un esprit d'entreprise pourront trouver de nouveaux débouchés, augmenter leurs revenus et attirer des investissements plus importants dès maintenant. Le gouvernement a choisi la bonne approche, fondée sur une analyse rigoureuse et un plan complet, afin que la transition s'effectue avec le moins de heurts possible. Il est temps d'agir. Les agriculteurs ne peuvent pas planifier leur avenir en utilisant les solutions du passé. Ils cultivent des produits de première classe et peuvent les écouler sur un marché mondial où les débouchés sont légion. Nous devons libérer nos agriculteurs afin qu'ils demeurent le moteur de notre économie tout en continuant à nourrir la planète.

Honorables sénateurs, je vous prie de mettre de côté vos vues partisanes. Il ne s'agit pas d'appuyer votre parti, mais bien d'appuyer et de libérer nos amis, les agriculteurs de l'Ouest canadien. De tous les pays du monde, c'est le nôtre qui doit mener la charge pour ce qui est de l'égalité. Je demande à tous les sénateurs de défendre la liberté et d'appuyer cette mesure législative importante.

L'honorable Robert W. Peterson : Honorables sénateurs, j'aimerais pouvoir parler du projet de loi C-18 dans de meilleures circonstances. Le gouvernement s'est lancé tête première dans une course pour faire adopter ce projet de loi par le Parlement, un peu comme un adolescent qui vient tout juste de mettre la main sur les clés de la voiture de ses parents, mais n'est pas en mesure de la conduire en toute sécurité. Tôt ou tard, quelqu'un sera blessé. Le gouvernement a imposé la clôture à plusieurs reprises, n'a pas voulu accepter d'amendements et a refusé de se déplacer afin d'entendre le témoignage des agriculteurs de l'Ouest canadien, ceux-là mêmes qui sont visés par le projet de loi.

Honorables sénateurs, compte tenu de l'arrogance dont le gouvernement fait preuve, cela ne peut que mal finir.

Comment tout cela a-t-il commencé? En fait, la Commission canadienne du blé a été créée en 1935 par le gouvernement conservateur. Les agriculteurs venaient de vivre plusieurs années très difficiles sur le marché libre. La commission a permis d'obtenir le volume nécessaire pour assurer la viabilité financière des exploitations familiales. Elle est ensuite devenue la pierre angulaire des exploitations familiales dans les Prairies. Grâce à son guichet unique, elle commercialise toute la production de blé, de blé dur et d'orge des Prairies et du bassin de la rivière de la Paix, qu'elle soit destinée à être exportée ou à nourrir les Canadiens. La Commission canadienne du blé s'occupe de la logistique du marketing : elle trouve des clients, négocie les modalités de vente et livre les produits aux clients. Elle s'occupe aussi des options d'établissement des prix et offre aux agriculteurs un juste équilibre entre les risques et le taux de rendement en ce qui concerne les contrats de vente de grain.

La mise en commun des prix, qui est l'aspect important, permet de s'assurer que pour un grade donné, les agriculteurs reçoivent le même montant, quel que soit l'endroit ou le moment où le blé ou l'orge est vendu. La mise en commun protège les agriculteurs contre les variations de prix et les empêche de se faire concurrence. Tant la logistique du marketing que les options d'établissement des prix permettent de faire des économies d'échelle, car ce sont des frais généraux. Plus il y a d'agriculteurs qui participent, plus les prix sont bas pour tous.

Honorables sénateurs, au cours des 80 dernières années, la Commission canadienne du blé a connu un succès retentissant. Elle défend bien les intérêts des agriculteurs de l'Ouest et ne coûte rien aux contribuables. Elle redistribue chaque année entre 4 et 7 milliards de dollars aux agriculteurs. Des économistes indépendants établissent à 600 millions de dollars par année l'avantage net que la Commission canadienne du blé rapporte aux agriculteurs. Plus de 60 000 agriculteurs en profitent.

Pourquoi toucher à quelque chose qui a du succès? Ce n'est pas à cause des résultats. C'est plutôt qu'au cours de la dernière décennie, les conservateurs se sont lancés dans une croisade idéologique visant à démanteler la Commission canadienne du blé. Leurs convictions, non vérifiées, au sujet du libre choix en matière de commercialisation font qu'ils ne peuvent pas accepter que des entreprises commerciales d'État comme la Commission canadienne du blé puissent faire plus pour les agriculteurs que les sociétés privées.

Le gouvernement n'a pas analysé les coûts et les avantages de l'abolition de la commission. Il n'a pas fait preuve de diligence raisonnable pour une bonne raison, parce que s'il avait fait cet exercice, il aurait découvert des gains pour les multinationales du grain et les chemins de fer, mais pas pour les agriculteurs.

Tragiquement, honorables sénateurs, la colère qui a alimenté la fureur de la base conservatrice était dirigée vers l'ancienne Commission canadienne du blé, avant qu'un gouvernement libéral donne aux agriculteurs le contrôle de la plupart des postes au sein de son conseil d'administration. Le projet de loi C-18 détruira la Commission canadienne du blé et poussera les agriculteurs dans les bras des multinationales qui se battent depuis des années pour que cela se produise. Il y aura là tout ce qu'il faut pour satisfaire leur appétit vorace. L'occasion est extraordinaire pour le secteur privé. Comme l'a déclaré un cadre de l'industrie : « Nous attendons cette occasion avec beaucoup d'impatience. »

Contrairement au gouvernement, le Parti libéral respecte le droit à l'autodétermination des producteurs de grains de l'Ouest canadien. Les agriculteurs devraient pouvoir décider eux-mêmes de l'avenir du système de commercialisation à guichet unique de la Commission canadienne du blé. Nous appuyons les agriculteurs qui se sont réunis à Winnipeg, à Colonsay et un peu partout dans les Prairies pour manifester. Nous appuyons les centaines de Canadiens qui écrivent chaque jour à leur député pour lui demander d'empêcher l'adoption de ce projet de loi. Nous sommes ici pour défendre le droit des agriculteurs de décider eux-mêmes de leur avenir.

Lorsque cela faisait leur affaire, les conservateurs affirmaient eux aussi qu'ils allaient respecter le choix des agriculteurs. En mars de cette année, environ deux mois avant ces élections qu'on présente si souvent comme étant le moment décisif entre tous, le ministre de l'Agriculture a dit aux agriculteurs de Minnedosa que son gouvernement ne tenterait pas de supprimer le système à guichet unique, à moins que les agriculteurs votent en faveur de cette mesure. Il a déclaré ce qui suit :

Tant que les agriculteurs ne se prononceront pas en faveur de ce changement, je ne suis pas prêt à travailler de façon arbitraire. Ils ont entièrement raison de croire à la démocratie. J'y crois, moi aussi.

Si vous êtes un agriculteur et que vous entendez cela, vous vous dites que vous pouvez faire confiance au ministre, non? Il parle au nom du gouvernement, n'est-ce pas? C'est ce qu'on pourrait croire.

Hélas, ce n'étaient que des paroles en l'air. Après la campagne électorale, le ministre a fait volte-face et affirme maintenant que les élections ont donné au gouvernement le feu vert pour priver les agriculteurs de leur droit légitime de se prononcer sur la question.

Quelqu'un aurait dû informer les agriculteurs. Même ceux qui s'opposaient à la Commission canadienne du blé pensaient avoir la possibilité de se prononcer directement sur leur avenir.

On voit manifestement pourquoi le ministre s'oppose à la tenue d'un vote. Il sait qu'il perdrait. Le vote de près de 40 000 agriculteurs organisé par la Commission canadienne du blé l'été dernier — parce que le gouvernement refusait de l'organiser — a montré que la majorité d'entre eux préféraient conserver le guichet unique pour commercialiser le blé et l'orge. Soixante-deux pour cent des producteurs de blé et 51 p. 100 des producteurs d'orge étaient en faveur du guichet unique.

Les résultats sont remarquablement similaires à ceux du vote de 600 producteurs de la Saskatchewan à l'occasion d'une consultation menée par Saskatchewan Agriculture and Food, en janvier 2007, soit : 58 p. 100 en faveur du maintien du guichet unique.

(1520)

De plus, depuis 1998, lorsque les agriculteurs ont pu voter pour élire les administrateurs, 80 p. 100 des élus étaient de fervents partisans du guichet unique. Si l'hostilité est si vive envers la Commission canadienne du blé, pourquoi les opposants sont-ils incapables de faire élire leurs propres administrateurs? C'est simple : les agriculteurs de l'Ouest du Canada veulent conserver le guichet unique qu'est l'actuelle Commission canadienne du blé.

Un vote libre, ce n'est pas qu'un vain souhait. C'est la loi de notre pays, car l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé, qu'on a mentionné cet après-midi, consacre le principe voulant que les agriculteurs des Prairies décident s'il y a lieu de modifier la nature du guichet unique. C'est une violation flagrante de la Loi sur la Commission canadienne du blé que d'aller de l'avant sans que les agriculteurs aient l'occasion de voter.

À l'évidence, les conservateurs ne croient pas que les agriculteurs peuvent gérer leurs propres affaires. Le projet de loi C-18 élimine le contrôle par les producteurs des activités de la Commission canadienne du blé et le remplace par un contrôle gouvernemental direct et total.

Actuellement, les agriculteurs élise 10 des 15 membres du conseil d'administration. Si le projet de loi C-18 est adopté, ils seront remplacés par cinq membres nommés par le gouvernement.

Non content de refuser aux agriculteurs le droit de prendre la décision, le gouvernement refuse aussi de dire que le projet de loi C- 18 leur vaudra de meilleurs prix. Pourquoi? Parce qu'il n'en sera rien.

La Commission canadienne du blé a assez de poids pour faire des distinctions de prix entre les différents marchés. Le prix qu'il exige des clients indonésiens est inférieur à celui qu'il pratique en Angleterre parce qu'il s'agit de deux marchés fort différents. Si le prix ne plaît pas à l'Angleterre, elle n'a pas le choix ou à peine. Par contre, en l'absence de guichet unique, le client peut jouer une compagnie céréalière contre l'autre et ainsi faire baisser le prix. Cette capacité de pratiquer des prix distincts est réelle. Des études ont montré que cela valait 600 millions de dollars par année. C'est de 34 $ à 41 $ de plus la tonne pour les agriculteurs. Pour le producteur qui a des emblavures de 1 000 acres, c'est 41 000 $ de plus par année.

La Commission canadienne du blé rend aussi tout le produit des ventes aux agriculteurs, en déduisant les coûts de la commercialisation. Ce sont environ 98 p. 100 des profits qui vont aux producteurs. Les céréalières, par contre, achètent au plus bas prix possible et vendent aux clients le plus cher possible. Les profits ne vont pas aux agriculteurs. Ils sont distribués aux actionnaires ou réinvestis.

Aux termes du projet de loi C-18, les agriculteurs se livreront concurrence pour vendre leur production aux céréalières. Les quelques acheteurs paieront le prix le plus faible possible. Ils feront des recherches sur le marché pour éviter d'offrir des prix plus élevés que ceux de leurs concurrents. Comme le grain n'est pas périssable, les acheteurs les entasseront pendant les années où les prix sont faibles et verront venir les agriculteurs les autres années, gardant les prix à la baisse.

Les céréalières pourront aussi refuser d'accepter les livraisons des agriculteurs, invoquant le manque d'espace d'entreposage, lorsque les prix sont élevés.

Ceux qui s'opposent à la Commission canadienne du blé prétendent que l'élimination du guichet unique favorisera davantage la transformation dans les Prairies. Ils négligent de dire que, si cela se produit, ce sera parce que le grain se vend à des prix plus faibles. Les industries à valeur ajoutée cherchent à acheter le grain le moins cher possible. Elles importeront du grain, comme le blé subventionné des États-Unis, pour faire baisser les prix sur les marchés locaux.

On parle souvent des pâtes alimentaires comme d'un débouché à valeur ajoutée. Il est peu réaliste d'en attendre beaucoup de choses. Il s'agit d'une industrie en phase de maturité, dominée par de grandes sociétés qui peuvent acheter de l'espace sur les tablettes des supermarchés. La production à valeur ajoutée est suscitée par la demande du consommateur. Elle n'est pas déterminée par le régime de commercialisation. Le blé et le blé dur se chargent en vrac facilement, peuvent parcourir de longues distances à un coût relativement bas et s'entreposent facilement. Ils ont donc toujours été transformés près de leur destination finale.

Le Canada ne remplacera pas les usines de pâtes alimentaires construites de l'autre côté de la frontière grâce à des subventions et à un traitement fiscal particulier. Environ 30 p. 100 du blé dur moulu aux États-Unis pour la fabrication des pâtes alimentaires sont déjà importés de la Commission du blé, ce qui prouve que le prix ne détermine pas le choix de l'emplacement d'une usine.

Quoi qu'il en soit, les agriculteurs livraient directement aux minoteries et aux brasseries depuis des années. La capacité des minoteries canadiennes a augmenté de 10 p. 100 au cours de la dernière décennie. Le ministre de l'Agriculture a soutenu que les résultats du blé seraient les mêmes que ceux du canola, dont les producteurs peuvent vendre leurs récoltes aux usines locales de traitement. Il ne faut pas perdre de vue que le canola est une graine oléagineuse, et non un aliment. Il est très périssable et peut être traité localement.

Le blé et le blé dur sont expédiés aux grands marchés pour y être transformés parce qu'ils sont peu coûteux et faciles à transporter. Le canola, par ailleurs, ne voyage pas aussi bien et peut être facilement traité dans l'Ouest. Même le chef de la direction de Cargill dit que l'élimination de la Commission du blé n'augmentera probablement pas la quantité de blé moulu ou d'orge brassée dans l'Ouest du Canada.

La disparition de la Commission du blé réduira la qualité de notre grain. De concert avec la Commission canadienne des grains et l'Institut international du Canada pour le grain, la Commission canadienne du blé veille à ce que tout le blé et tout l'orge du Canada réponde à certaines normes de qualité qui nous ont acquis une grande réputation sur les marchés mondiaux, ce qui nous assure un prix élevé. En l'absence de la commission, notre grain ne se distinguera de celui de nos concurrents qu'en fonction du prix, ce qui entraînera une chute tant des prix que de la qualité.

Le gouvernement aime parler d'un double système de commercialisation. En réalité, il prépare le démantèlement de la Commission canadienne du blé. Il est difficile de voir comment la commission peut fonctionner sans guichet unique, sans assise financière et sans accès aux installations de manutention des grains et aux installations portuaires.

Le rapport du Groupe de travail sur la liberté de commercialisation créé par le gouvernement ne reconnaît pas les réalités du secteur des grains de l'Ouest. Il semble que le gouvernement Harper n'ait aucune idée de la façon dont la commission fonctionnera sans guichet unique et que, de toute façon, il ne s'en soucie guère.

Le gouvernement n'a absolument aucun modèle commercial pour remplacer la Commission canadienne du blé. Il prétend qu'elle peut survivre sans guichet unique en passant à un système de mise en commun volontaire, mais c'est un système de ce genre qui a échoué dans les premiers temps de l'industrie canadienne du grain, qui est en train d'échouer aujourd'hui en Ontario et qui s'est complètement effondré en Australie.

Le gouvernement prétend aussi qu'il contribuera au financement de la réorganisation liée au démantèlement du monopole. Toutefois, il a refusé de dire quels fonds d'amorçage il avancera à cette fin.

En juillet, la Commission canadienne du blé a exposé au gouvernement les mesures à prendre pour lui permettre de survivre en tant qu'organe de commercialisation à adhésion volontaire. Le gouvernement ne lui a pas encore répondu. Les recommandations de la commission comprenaient une injection de capital de 225 millions de dollars pour financer les stocks et les opérations commerciales jusqu'à ce que la commission puisse montrer des résultats probants aux prêteurs privés, une réserve de risque de 200 millions de dollars pour couvrir les garanties initiales de paiement aux agriculteurs en cas de baisse des prix et des garanties de prêt pendant un minimum de cinq ans pour couvrir le financement de la dette. Ce genre de soutien de transition est absolument nécessaire. Comme le président, Allen Oberg, l'a dit, si une commission à adhésion volontaire doit fonctionner sur une base strictement commerciale, elle n'existera pas pendant très longtemps.

Ces mesures ne font qu'effleurer la surface du défi à relever. Il serait nécessaire que le gouvernement devienne provisoirement propriétaire du nouvel organisme de commercialisation à adhésion volontaire parce qu'aucune autre structure de propriété ne peut être mise en place au cours des neuf prochains mois. Des règlements sont nécessaires pour permettre à une commission à participation volontaire d'accéder aux silos, aux terminaux portuaires et à des wagons parce qu'elle ne possédera pas d'installations lui appartenant en propre. Pourtant, cette demande a été rejetée par le groupe de travail du ministre.

Le gouvernement projette de supprimer l'accès réglementé de la commission aux installations de manutention du grain, dont la plupart sont gérées par trois grandes sociétés de manutention. Comment la Commission canadienne du blé peut-elle s'attendre à ce que des sociétés privées qui sont ses concurrentes acceptent de prendre son grain dans leurs silos?

Le projet de loi C-18 sonne le glas des petites installations régionales de manutention du grain, qui comptent sur la Commission canadienne du blé pour avoir un accès concurrentiel aux capacités portuaires. Sans cet accès, elles ne seront plus rentables, ce qui entraînera une plus grande concentration du marché et réduira les options de livraison des agriculteurs. Avec moins de concurrence, les prix versés aux agriculteurs baisseront.

L'emprise sur le marché constitue un énorme problème dans le réseau ferroviaire, qui est extrêmement concentré dans l'Ouest où il n'existe que deux compagnies ferroviaires. Pourtant, le projet de loi C-18 ne prévoit rien pour protéger les agriculteurs contre le duopole ferroviaire.

Sans la Commission canadienne du blé, il n'y aura plus dans le système de joueurs assez puissants pour défendre les agriculteurs et affronter les chemins de fer lorsqu'ils sont incapables d'offrir les services nécessaires, ce qui se produit une fois sur deux, selon l'Examen des services de transport ferroviaire des marchandises réalisé par le gouvernement, ou lorsqu'ils essaient d'imposer des taux de transport excessifs.

Le gouvernement dit qu'il prend des mesures dans le cadre de son Examen des services de transport ferroviaire des marchandises, mais il dit cela depuis mai 2007. Quatre ans et demi plus tard, on vient tout juste de nommer un facilitateur; il faudra attendre encore un an la loi et le règlement. On a vu des glaciers avancer plus vite que cela.

(1530)

Autrefois, le droit des producteurs de charger leurs propres wagons a été une protection contre l'exploitation commerciale. Grâce à la Commission canadienne du blé, les agriculteurs ont pu charger eux-mêmes les wagons-trémies, ce qui leur a permis d'économiser 1 200 $ par wagon. Pendant la dernière campagne agricole, 12 000 wagons-trémies ont été chargés. Les économies pour les agriculteurs ont donc été de 14,4 millions de dollars.

S'il est vrai que, techniquement, ce droit restera intact, le projet de loi C-18 causera un tort peut-être fatal au réseau d'embranchements qui offre des sites de chargement pour les wagons des producteurs et aux sociétés ferroviaires secondaires qui les exploitent.

Selon le rapport du groupe de travail, les wagons des producteurs n'auront aucune priorité dans le système. Les agriculteurs pourront commander un wagon et ils pourront l'obtenir des mois plus tard s'il ne se passe rien d'autre à ce moment-là. C'est un droit qui n'a aucune application sérieuse, à moins que les wagons des producteurs ne puissent avoir une certaine priorité et ne puissent faire la livraison dans les ports.

Les entreprises céréalières et les chemins de fer se sont toujours opposés à l'existence de terminaux céréaliers appartenant aux producteurs et au transport ferroviaire sur courtes distances parce qu'il permet aux producteurs de contourner leur système et crée de la concurrence, ce qui les empêche d'obtenir les tarifs et les honoraires qu'ils souhaitent. De toute évidence, ils ne seront pas enclins à permettre que de telles innovations se poursuivent dans un réseau non réglementé.

Les entreprises céréalières possèdent aussi les terminaux portuaires. En l'absence de la Commission du blé, elles n'accepteront pas nécessairement les wagons de producteurs et obligeront probablement les agriculteurs à utiliser leurs silos et à payer des droits de manutention, ce qui mettra fin aux économies qu'ils pouvaient réaliser grâce aux wagons de producteurs. Comme les chemins de fer secondaires servent surtout au transport de wagons de producteurs, ils risquent de disparaître si la Commission canadienne du blé est démantelée.

M. Oberg, président du conseil d'administration de la Commission canadienne du blé, a dit que les besoins communiqués au gouvernement pendant l'été constituaient le minimum pouvant assurer une chance de survie à la commission. Pourtant, au lieu de collaborer en vue d'une transition réaliste, le gouvernement essaie de prouver que le conseil d'administration refuse de collaborer. Il s'organise pour que la commission sombre et qu'il puisse en rejeter le blâme sur les administrateurs.

Malgré les affirmations du gouvernement, la Commission canadienne du blé ne peut pas fonctionner comme coopérative de commercialisation à participation volontaire. Les coopératives à base volontaire ne peuvent pas réussir parce qu'un certain nombre de membres essaieront de faire leur propre commercialisation lorsque les prix seront élevés, puis réintégreront la coopérative en cas de baisse des prix. Au lieu de mettre les récoltes en commun bon an mal an, de façon à répartir le risque, ils essaieront de profiter du marché, ce qui nuira à tout le monde. Les coopératives de commercialisation à adhésion volontaire n'obtiennent ni des prix élevés ni des conditions favorables de financement, parce qu'elles sont basées sur des amitiés qui ne durent que par beau temps.

Si une Commission du blé à adhésion volontaire fait faillite, ce sont les contribuables qui écoperont. Une analyse réalisée par la commission et revue par des comptables de KPMG a abouti à la conclusion que les coûts liés au démantèlement de la commission se chiffreront en centaines de millions de dollars. La fermeture de la Commission canadienne du blé coûtera à la seule ville de Winnipeg quelque 2 400 emplois.

Les petites villes et les exploitations familiales seront durement touchées par les changements prévus dans le projet de loi C-18. Partout dans le monde, la déréglementation a coïncidé avec un regroupement de l'agriculture dans un nombre moindre d'exploitations de grande taille. Confrontés à des coûts croissants de commercialisation, les petits producteurs doivent vendre leur exploitation à leurs gros concurrents. Cela dévastera les petites villes des Prairies, dont l'économie dépend des petits agriculteurs qui ont un revenu disponible. Le projet de loi C-18 sonnera le glas de la petite exploitation qui constitue le fondement des petites villes, partout dans les Prairies.

Les données internationales confirment cet état de choses. La Nouvelle-Zélande avait une commission qui détenait le monopole de la commercialisation des pommes et des poires entre 1948 et 1994. Lorsque le marché intérieur a été déréglementé en 1994, les prix ont chuté. En 2001, le monopole que la commission détenait sur l'exportation a été levé, ce qui a ouvert la voie à un regroupement de l'industrie qui a causé des difficultés financières à de nombreux producteurs. Le nombre de pomiculteurs est passé de 1 500 en 1998 à 900 en 2005.

Selon le département américain de l'Agriculture, la déréglementation a accéléré l'intégration verticale et causé une baisse de la qualité des pommes et une réduction du développement des marchés à l'étranger. Lors de la campagne 2004-2005, de nombreux producteurs couraient à la ruine à cause des changements survenus dans l'industrie et de l'élimination du guichet unique. Les producteurs qui ont cessé d'exercer leurs activités ont déclaré en majorité qu'ils ne pouvaient plus prendre suffisamment d'expansion pour être rentables.

On trouvera un autre exemple dans les commissions provinciales de commercialisation du porc du Manitoba, de l'Alberta et de la Saskatchewan. La majorité des petites exploitations familiales s'étaient opposées à l'élimination des commissions provinciales en 1997 parce qu'elles étaient persuadées qu'elles ne pourraient pas concurrencer les grandes exploitations. Même si la tendance était déjà à la concentration dans le secteur de l'élevage du porc, l'élimination des offices de commercialisation a défavorisé et souvent ruiné de nombreux producteurs familiaux.

La commission australienne du blé a perdu son monopole sur la commercialisation intérieure du grain en 1989 et s'est transformée en une société privée cotée en bourse entre 1999 et 2001. Toutefois, ce n'est qu'en 2008 que la Commission australienne a perdu son monopole sur l'exportation du blé. Les rapports produits permettent de croire que les producteurs connaissent des difficultés d'adaptation, qui pourraient durer longtemps, surtout les agriculteurs les plus petits et les plus âgés, depuis la disparition du guichet unique d'exportation en 2008.

La commission australienne du blé a fini par être vendue à Agrium, qui a repris le commerce des fournitures agricoles, mais non les opérations de manutention du grain. Agrium a finalement cédé à Cargill son département des grains qui périclitait.

Le plus triste dans toute cette affaire, c'est le sort du port de Churchill, dont 95 p. 100 des expéditions provenaient de la Commission canadienne du blé. Toutefois, comme les entreprises céréalières privées ont leurs installations sur la côte Ouest, à Thunder Bay et le long du Saint-Laurent, elles n'ont aucun intérêt à utiliser le port de Churchill. Comment fera-t-il donc pour survivre?

Le gouvernement a bien l'intention d'offrir au port une subvention de 5 millions de dollars par an pour appuyer les expéditions de grain pendant cinq ans et une autre subvention de 4 millions de dollars sur trois ans pour l'entretien. Mais qu'adviendra- t-il du port de Churchill au bout de ces cinq ans? Même avec une subvention, pourquoi les entreprises céréalières privées utiliseraient- elles ce port si elles ont déjà leurs propres installations?

Autre question sans réponse : comment tout cela s'inscrit-il dans notre stratégie internationale? En adoptant le projet de loi C-18, nous accordons aux Américains leur premier objectif commercial sans contrepartie dans une période de protectionnisme de plus en plus marqué. Qu'obtiendrons-nous en retour? En contrepartie, nous aurons la politique d'achat aux États-Unis, la discrimination en matière de taxes maritimes, l'alourdissement des formalités de franchissement de la frontière, l'imposition de droits sur le bois d'œuvre résineux, et j'en passe.

L'élimination de la Commission canadienne du blé constituait le premier objectif commercial des États-Unis en Amérique du Nord depuis 20 à 25 ans. Grâce à la générosité du gouvernement conservateur de M. Harper, les États-Unis sont sur le point de voir exaucer leur vœu le plus cher, sans que le Canada obtienne une quelconque contrepartie.

Le ministre a établi un calendrier très ambitieux prévoyant la vente du grain d'ici le 1er août. Comment les agriculteurs peuvent-ils se faire entendre, comment ces changements peuvent-ils être mis en œuvre dans un laps de temps aussi court?

Une fois partie, la Commission canadienne du blé — ou tout autre office de commercialisation — disparaîtra à jamais grâce aux procédés de privatisation à sens unique intégrés dans des accords tels que l'ALE et l'ALENA et aux institutions telles que l'Organisation mondiale du commerce.

Qui en profitera? Ce ne sera pas les agriculteurs, car ils perdront le contrôle de la Commission canadienne du blé, qui obtient les prix les plus élevés, en échange de la « liberté » de vendre leurs produits à des sociétés céréalières qui font des affaires pour enrichir les actionnaires. Ce ne sont pas non plus les contribuables, qui paieront pendant des années les coûts liés à l'élimination progressive de la Commission canadienne du blé. Ce ne sont pas davantage les collectivités rurales, qui risquent de perdre les services des lignes ferroviaires secondaires et des lignes ferroviaires sur courtes distances.

Qui en profite? Les sociétés céréalières, les lignes ferroviaires et les idéologues du gouvernement Harper.

Honorables sénateurs, le Sénat a toujours eu la réputation d'étudier les projets de loi de façon exemplaire et de représenter les minorités canadiennes. Nous avons le devoir d'étudier de façon exhaustive tout projet de loi selon : qui nuit gravement à une ou plusieurs régions; qui viole des droits et des libertés protégés par la Constitution; qui viole des droits collectifs, des droits linguistiques ou des droits des minorités; qui a trait à une question qui revêt une importance suffisamment grande pour l'avenir du Canada pour que l'on exige que le gouvernement obtienne un mandat de l'électorat; qui est si répugnant qu'il s'agit presque d'un abus du pouvoir législatif du Parlement.

Chacun de ces cinq motifs tient compte des principes fédéraux que l'on voulait défendre en créant le Sénat : la défense des intérêts de représentation, la protection des droits gouvernementaux, la promotion des droits des minorités, la responsabilité gouvernementale et la surveillance du pouvoir législatif.

Honorables sénateurs, nous avons la responsabilité de veiller à ce que le Sénat agisse de façon cohérente et légitime. Pourtant, dans certaines circonstances, le nouveau gouvernement majoritaire est souvent impatient envers la Chambre haute et place le Sénat dans une position peu enviable où il a toujours tort, quoi qu'il fasse.

Si nous refusons d'adopter ce projet de loi tel quel, nous serons certainement accusés de faire de l'obstruction ou de commettre un outrage à l'électorat. Toutefois, si le Sénat adopte cette mesure législative sans aucune réserve, il aura manqué à son devoir constitutionnel qui est de procéder à une réflexion objective et d'exiger des comptes du gouvernement. Nous ne rendrions pas justice aux groupes que nous représentons.

(1540)

Le gouvernement prétend avoir fait preuve de diligence raisonnable et a soumis ce projet de loi à l'examen d'un comité. Mais il n'a pas consulté les agriculteurs de la région où les retombées négatives de cette mesure seront les plus marquées.

Honorables sénateurs, je conclurai avec cette question : que répondrez-vous à vos petits-enfants quand ils vous demanderont : « Où étiez-vous quand ils ont détruit la Commission canadienne du blé? »

Des voix : Bravo!

[Français]

L'honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, je m'en voudrais de ne pas vous faire certains commentaires au tout début de mon discours sur le projet de loi C-18.

Il ne fait aucun doute dans mon esprit que nous pourrions faire de ce débat un débat partisan ou très politique : l'Ouest contre l'Est. Je me pose une question. Cet après-midi, j'ai eu l'occasion de rencontrer à mon bureau un jeune agronome de l'Est du Canada, de la région du Restigouche, qui a parcouru les provinces de l'Est et l'Ouest du Canada. Il m'a fait part de ses préoccupations à l'égard du projet de loi. C'était la première fois que quelqu'un cognait à ma porte pour me faire part de ses commentaires sur le projet de loi C- 18, sans être sollicité, et particulièrement provenant d'une région prédominante par la culture de la pomme de terre, et par la pêche pour d'autres régions de cette même province. Il m'a demandé d'imaginer une commission à guichet unique pour la mise en marché des produits de la pêche et de la pomme de terre. Je dois dire, honorables sénateurs, que les gens de chez nous descendraient probablement dans la rue.

Cela dit, plutôt que de faire un débat partisan et même politique, étant donné que j'ai une responsabilité à titre de président du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, je vais opter pour un débat de faits et de fond.

[Traduction]

Il est important de préciser, dès le départ, que le projet de loi C-18 ne met pas en péril la gestion de l'offre au Canada. Au cours des trois dernières semaines, j'ai téléphoné à des agriculteurs de l'Est du Canada, du Québec, de l'Ontario et des provinces de l'Ouest. Je tenais à leur confirmer que notre gouvernement ne mettra pas en péril la gestion de l'offre du Canada.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Mockler : Honorables sénateurs, si je repense à la façon dont les choses se sont déroulées et à ce que m'ont dit les agriculteurs de l'Est comme de l'Ouest, je peux affirmer que les agriculteurs ont toujours été bien informés, sous la direction du premier ministre, que le projet de loi C-18 serait présenté et donnerait lieu à un vote. C'est ce qui se passera aujourd'hui.

Les honorables sénateurs savent quels ont été les résultats à l'autre endroit. J'aimerais citer le premier ministre Stephen Harper, qui a prononcé un discours en Saskatchewan le 7 octobre 2011. Il était alors accompagné du ministre Ritz et du premier ministre Brad Wall pour annoncer un investissement qui créera des emplois dans une usine de pâtes alimentaires, la première du genre dans l'Ouest canadien.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Mockler : Le premier ministre a dit ce qui suit :

[...] le gouvernement s'est engagé à donner aux producteurs de l'Ouest la liberté de choisir de commercialiser leurs produits, une liberté que les producteurs de céréales de l'Est tiennent pour acquise depuis longtemps.

Une voix : C'est tout à fait vrai.

Une voix : Absolument.

Le sénateur Mockler : Le premier ministre a ajouté ceci :

Ce n'est pas seulement une question de principe, cela offrira aussi de réels avantages économiques comme celui-ci...

— l'usine de pâtes dans l'Ouest canadien —

... et des débouchés pendant de nombreuses années.

[Français]

Honorables sénateurs, les Canadiens et les Canadiennes ont toujours connu la position de notre gouvernement en ce qui a trait à ses politiques sociales et économiques. Nous l'avons toujours dit et nous le répétons encore aujourd'hui : notre objectif ultime est la création d'emplois, l'économie et l'assurance de ne pas hypothéquer l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants.

[Traduction]

Nous faisons cause commune pour la prochaine génération, et pas seulement pour les prochaines élections.

Des voix : Bravo!

Une voix : Contrairement aux sénateurs d'en face.

Le sénateur Mockler : Honorables sénateurs, afin d'améliorer les activités et les perspectives économiques, le projet de loi C-18 donnera un meilleur accès au marché aux jeunes agriculteurs dynamiques de partout au Canada, mais surtout dans l'Ouest. Peu importe où nous vivons au Canada, nous avons un but commun : faire du Canada un endroit où il fait bon travailler, vivre, élever des enfants et venir en aide aux plus vulnérables.

Honorables sénateurs, je suis fier d'intervenir au sujet de ce projet de loi et de dire que la priorité du gouvernement est l'économie, et que l'industrie agricole, peu importe où, joue et continuera de jouer un rôle important dans la qualité de vie des Canadiens.

Nous croyons que tous les agriculteurs canadiens devraient être en mesure de saisir les occasions de commercialisation qui s'offrent à eux à l'échelle internationale, et que les producteurs de grain de l'Ouest du Canada veulent avoir la même latitude et les mêmes possibilités commerciales que les autres agriculteurs du Canada et d'ailleurs. Nous croyons qu'ils veulent pouvoir choisir eux-mêmes avec qui ils font affaire et quand, comme c'est le cas dans l'Est du Canada.

Une voix : C'est une idée originale.

Le sénateur Mockler : Nous sommes d'accord avec le ministre de l'Agriculture quand il dit qu'il faut s'occuper des agriculteurs en premier. Nous savons que l'agriculture ne s'arrête jamais, qu'il s'agit d'un travail incessant qui nécessite une importante planification et gestion des activités. Nous savons aussi que l'agriculture se classe parmi les industries les plus passionnantes et novatrices du pays. L'industrie céréalière à elle seule génère des revenus de plus de 16 milliards de dollars pour les agriculteurs et occupe une très grande place dans l'économie de tous les Canadiens.

L'honorable Michael Duffy : Vous pouvez répéter? Combien?

Le sénateur Mockler : Elle génère des revenus de 16 milliards de dollars. Je suis fier de voir que le Canada continue de se démarquer pour ses produits agricoles novateurs de qualité.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Mockler : Honorables sénateurs, je crois sincèrement que nous devons tout ce succès aux premiers innovateurs du pays, les agriculteurs.

Voici quelques données intéressantes. Le secteur agroalimentaire est le principal employeur industriel du pays, et il contribue amplement à faire rouler l'économie d'un bout à l'autre du pays.

(1550)

Jetons un coup d'œil sur d'autres faits. Le Canada est en train de se positionner parmi de nouveaux joueurs et nous ne pouvons pas faire l'autruche. Il y a de nouveaux joueurs sur la scène internationale, de nouveaux marchés en pleine croissance comme le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine. Or, en faisant ce que prévoit le projet de loi C-18, nous serons en mesure de soutenir la concurrence.

Notre productivité a augmenté de 300 p. 100 depuis les années 1950, et nous faisons appel à des technologies plus nombreuses et plus poussées. De plus en plus de jeunes se lancent dans l'agriculture, ce qui est aussi une très bonne nouvelle, même si nous devons relever des défis dans d'autres secteurs au Canada.

L'autre soir, j'ai écouté entre 60 à 75 agriculteurs de l'Ouest. Peu importe la région précise d'où ils venaient, c'était touchant d'entendre ce que ces jeunes producteurs avaient à nous dire. Ils répètent au gouvernement qu'ils veulent avoir un accès plus libre à ces marchés, et c'est pourquoi nous avons présenté le projet de loi C- 18.

Honorables sénateurs, le gouvernement du Canada, sous le leadership solide du premier ministre, est conscient que, si nous voulons que nos producteurs continuent de relever les défis changeants liés à la mondialisation, aux marchés internationaux et à l'évolution démographique, nous devons faire en sorte qu'ils aient la possibilité de soutenir la concurrence, sans être entravés par des tracasseries administratives ou enchaînés à un organisme qui restreint leur pouvoir de décider où et quand vendre leurs produits.

Donnons aux producteurs la liberté et les outils nécessaires pour diriger leurs entreprises comme bon leur semble. Pourquoi n'auraient-ils pas cette latitude? Ils prennent des risques comme tous les entrepreneurs. Le gouvernement croit qu'il faut protéger le droit démocratique des producteurs de diriger leurs entreprises, surtout que les propres sondages de la CCB confirment que le régime de commercialisation mixte est le choix le plus populaire chez les producteurs. C'est une option qui leur permet de déterminer le prix et la date de leurs ventes.

Honorables sénateurs, c'est pour cette raison que nous avons présenté une mesure législative qui vise à donner aux producteurs de blé, de blé dur et d'orge de l'Ouest canadien le droit démocratique de choisir le mode de commercialisation de leurs céréales, que ce soit de façon indépendante ou par une mise en commun volontaire.

Honorables sénateurs, la loi actuelle a été créée en 1943 par un décret en conseil, et non par des agriculteurs. Je vais le répéter, parce que c'est important aux fins du débat. La loi actuelle a été créée en 1943 par un décret en conseil, et non par des agriculteurs. Il s'ensuit que les producteurs de blé, de blé dur et d'orge de l'Ouest canadien n'ont pas les mêmes droits que les autres producteurs au pays pour ce qui est de l'endroit où ils vendent leurs produits. J'aimerais que les sénateurs de l'Est du Canada imaginent ce qui se passerait si l'on imposait la même restriction aux producteurs de pommes de terre.

Honorables sénateurs, quel sera l'effet du projet de loi? Je pense que nous aurons un marché libre qui va attirer les investissements, encourager l'innovation et créer des emplois à valeur ajoutée, ce qui peut inclure des installations de transformation telles que des usines de fabrication de pâtes. Les producteurs de l'Ouest méritent les mêmes possibilités de commercialisation que les producteurs des autres régions du pays.

Honorables sénateurs, ils veulent avoir la possibilité de commercialiser leurs propres céréales, que ce soit par le truchement de la CCB — sur une base volontaire —, par l'intermédiaire d'une compagnie céréalière, en traitant directement avec un transformateur, ou encore en vendant leurs produits à un client aux États-Unis ou ailleurs.

Les agriculteurs cherchent de nouveaux produits à valeur ajoutée et de nouvelles sources de revenus et ils aspirent à une plus grande souplesse pour la mise en marché de leurs produits. Pourquoi? C'est uniquement en raison de la concurrence mondiale. Je crois que la liberté en matière de commercialisation comporte de nombreux avantages économiques pour les collectivités des Prairies et je prévois également l'ouverture de nouvelles usines de transformation et la création d'emplois bien rémunérés. À l'heure actuelle, on doit obligatoirement s'adresser à la Commission canadienne du blé pour acheter du blé et de l'orge; il faut ouvrir ces marchés.

Le gouvernement a écouté les agriculteurs, il les écoute aujourd'hui et il continuera de les écouter à l'avenir. Honorables sénateurs, la grande qualité du blé, du blé dur et de l'orge cultivés au Canada est reconnue dans le monde entier.

Non, nous ne mettrons pas la gestion des approvisionnements en péril.

En conclusion, honorables sénateurs, je ne doute pas un seul instant que les membres du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts seront honorés d'entendre tous les témoins et qu'ils le feront dans le respect du décorum.

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Peterson de son intervention passionnée et réfléchie sur le droit démocratique des producteurs de blé et sur la responsabilité qui nous incombe, à titre de sénateurs, de prendre la bonne décision à leur égard.

D'entrée de jeu, je remercie l'ensemble des agriculteurs canadiens de leur dur labeur. Malheureusement, on oublie souvent ce qu'ils font pour les Canadiens.

Honorables sénateurs, j'habite à Dartmouth et j'ai grandi à Sydney. Mes grands-parents vivaient dans une ferme à Grand Mira, en bordure de la rivière Mira, au Cap-Breton et je me rappelle avoir passé là-bas de nombreux jours heureux lorsque j'étais enfant.

En dépit de mes origines paysannes, je ne m'y connais pas beaucoup en agriculture et je ne prétends pas être experte dans ce domaine. En tant qu'habitante de la Nouvelle-Écosse, je ne suis certainement pas non plus experte en ce qui concerne la culture du blé. J'ai siégé un certain temps au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, mais à l'époque, le comité faisait une étude sur les forêts. Je me permets d'ajouter qu'il s'agit d'une excellente étude.

Vous vous demanderez probablement pourquoi j'interviens au sujet du projet de loi C-18. Je prends part à ce débat parce que je crois à la démocratie et à l'équité pour les agriculteurs.

J'ai également dit aux agriculteurs que j'ai rencontrés que je défendrais leur cause au Sénat. À l'instar du sénateur Mockler, j'estime important que nous, sénateurs du Canada atlantique, défendions la cause de nos concitoyens qui vivent dans d'autres régions du Canada. Nous devons être solidaires.

Lorsque le gouvernement conservateur réformiste a présenté le projet de loi C-18 à l'autre endroit, l'enseignante en moi savait que j'avais intérêt à faire mes devoirs afin de mieux comprendre ses implications. J'ai lu des articles sur la question. J'ai évidemment lu le projet de loi. J'ai écouté les personnes qui en savaient plus que moi sur la question. J'ai rencontré des agriculteurs saskatchewanais la semaine dernière, et ils m'ont fait part de toute leur frustration par rapport au projet de loi C-18. Certains avaient voté pour les conservateurs aux dernières élections, car ils avaient cru le ministre Ritz sur parole lorsqu'il a affirmé que les agriculteurs pourraient voter pour dire au gouvernement s'ils voulaient ou non qu'il se débarrasse de la Commission canadienne du blé. Malheureusement, leur confiance a été trahie. Je ne crois pas que le ministre ait dit la vérité.

Les agriculteurs avaient bon espoir que les sénateurs — aussi bien libéraux que conservateurs — les soutiendraient en s'opposant au projet de loi Bill C-18. Ceux avec qui j'ai parlé pensaient s'être fait passer un sapin à cause de la procédure à l'autre endroit. Le comité de la Chambre des communes n'a cité qu'un seul témoin à comparaître pour défendre la Commission canadienne du blé, et les agriculteurs ont eu l'impression qu'il y a eu des petits jeux politiques pour limiter les témoignages en commençant par de longs préambules afin de réduire le temps qui leur était alloué pour s'exprimer. Les agriculteurs ont répété que 62 p. 100 des producteurs avaient voté en faveur du maintien du guichet unique. Soixante- deux pour cent. Pourtant, le gouvernement fait fi de leur volonté.

(1600)

Le sénateur Plett a évoqué les résultats des dernières élections fédérales. Je n'en étais pas très satisfaite, mais je suis toujours contente de voir la démocratie à l'œuvre. Malheureusement, le gouvernement semble croire que pour les Canadiens, la démocratie devrait finir avec les élections.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Cordy : C'est une vraie honte.

Les agriculteurs auxquels j'ai parlé étaient également très frustrés à l'idée que le gouvernement prévoit s'approprier le fonds de prévoyance de 200 millions de dollars constitué avec leur argent. Le gouvernement veut utiliser cet argent pour financer le démantèlement de la Commission canadienne du blé.

Cet argent, honorables sénateurs, appartient aux agriculteurs. Le fonds de prévoyance a été constitué pour parer aux fluctuations des taux de change et pour couvrir les risques. Je le répète, cet argent appartient aux agriculteurs. Le gouvernement veut s'en emparer et l'utiliser pour mettre fin aux activités de la Commission canadienne du blé, même si 62 p. 100 des producteurs sont favorables au système à guichet unique. Le gouvernement a décidé de mettre la main sur 200 millions de dollars appartenant aux agriculteurs. C'est honteux.

Voici ce que dit le paragraphe 51(1) du projet de loi :

Tout surplus qui reste après l'acquittement des dettes et engagements de la Commission et des frais, charges et dépenses liées à la liquidation appartient à Sa Majesté du chef du Canada.

L'argent va dans les coffres de l'État plutôt qu'aux agriculteurs qui l'ont fourni pour constituer le fonds. C'est honteux, et j'en suis consternée.

Le sénateur Gerstein a dit la semaine dernière que le gouvernement n'augmentait pas le fardeau fiscal. Pourtant, le gouvernement prend de l'argent qui appartient aux agriculteurs. Certes, on ne peut pas parler de prélèvement fiscal en l'occurrence, mais le gouvernement arrache tout bonnement de l'argent aux agriculteurs pour les récompenser d'avoir géré leurs finances prudemment.

Les agriculteurs indiquent également que le système actuel de la Commission canadienne du blé est transparent. Ils savent exactement quel est le coût de chaque étape de la distribution. Quatre-vingt-dix-huit pour cent des profits sont versés aux producteurs. Ce ne sera pas le cas une fois effectuée la réorganisation proposée. Les agriculteurs soulignent que les intermédiaires n'auront pas l'obligation de leur révéler les coûts associés à chaque étape de la commercialisation. La transparence sera absente.

Les agriculteurs voudraient que des audiences justes et équilibrées aient lieu au Sénat du Canada.

Honorables sénateurs, je crois que c'est une demande fort raisonnable de la part de ceux qui fournissent du blé aux Canadiens et à d'autres gens dans le monde. Je voudrais remercier les agriculteurs de la Saskatchewan, qui ont passé beaucoup de temps avec moi la semaine dernière et qui ont répondu à mes nombreuses questions. C'est bien la moindre des choses de respecter le principe de l'équité en tenant des audiences équilibrées au Sénat du Canada où les producteurs de blé de l'Ouest canadien pourront se faire entendre. Nous avons cette obligation envers eux.

Honorables sénateurs, le premier ministre progressiste- conservateur sir John A. Macdonald disait que le Sénat était la « Chambre de second examen objectif ». Malheureusement, cette expression, qui devrait illustrer ce que le Sénat du Canada peut faire de mieux, semble de moins en moins s'avérer. Les sénateurs qui font partie du gouvernement Harper semblent croire qu'ils doivent suivre aveuglément les souhaits de leur leader plutôt que d'étudier les mesures législatives et déterminer la meilleure chose à faire pour les Canadiens. Je crois que, en tant que sénateurs, il est de notre devoir d'étudier et d'évaluer les mesures législatives. Nous ne devrions pas adopter des projets de loi en après les avoir à peine étudiés, voire, pas du tout.

Honorables sénateurs, nous avons la responsabilité d'étudier toutes les mesures législatives. Des préoccupations tout à fait légitimes ont été soulevées à propos du projet de loi C-18. Nous devons répondre aux préoccupations des producteurs de blé et, en fait, à celles de tous les Canadiens, avant d'adopter ou non la mesure législative. C'est cela, la démocratie. Nous devons aux Canadiens de suivre le processus démocratique et nous le devons tout particulièrement aux agriculteurs de l'Ouest.

J'aimerais profiter de cette occasion pour remercier les agriculteurs qui m'ont rencontrée, moi, un sénateur de la région de l'Atlantique, pour me faire part de leurs préoccupations. C'est une honte que le gouvernement refuse de rencontrer les agriculteurs, et qu'il ait voté contre le projet du Comité sénatorial permanent de l'agriculture de tenir des assemblées publiques en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba.

Des voix : C'est honteux!

Le sénateur Cordy : J'aimerais aussi remercier tous les gens du pays, mais surtout ceux des provinces de l'Ouest, qui ont pris le temps de m'écrire. J'aimerais lire quelques-unes des lettres que j'ai reçues au cours des dernières semaines.

Même si je vote habituellement pour les conservateurs, je m'oppose vigoureusement à leur traitement malhonnête et odieux de la Commission canadienne du blé et de tous ceux d'entre nous qui souhaitent conserver le système de commercialisation à guichet unique. Le comportement épouvantable des conservateurs est devenu une source de honte pour beaucoup d'entre nous!

Les conservateurs de M. Harper ne cessent de dire qu'ils sont les champions des agriculteurs de l'Ouest. Cependant, si leur campagne pour démanteler le guichet unique de la Commission canadienne du blé est si honorable, pourquoi ont-ils recours à des tactiques si déshonorables pour parvenir à leurs fins? Depuis quand justifie-t-on l'utilisation de moyens malhonnêtes pour atteindre un objectif supposément noble? Non seulement le gouvernement enfreint-il la loi en essayant de faire adopter ce projet de loi à toute vapeur sans tenir de plébiscite auprès des producteurs, mais, depuis le début, son traitement maladroit du dossier a démontré son mépris inquiétant pour la liberté de parole et la démocratie.

Cette lettre a été envoyée par une personne qui a voté pour les conservateurs lors des dernières élections.

Un autre agriculteur de la Saskatchewan a écrit ceci :

Quand j'ai commencé à pratiquer l'agriculture en 1983, j'avais un quart de section de terre. Ma famille et moi avons travaillé très dur pour avoir une exploitation agricole durable de 12 quarts de section. Sans les garanties de vente et la réglementation des normes de qualité de la Commission canadienne du blé, mes rêves ne se seraient jamais réalisés.

Quel système le gouvernement mettra-t-il en place pour remplacer les services que la Commission canadienne du blé offre aux agriculteurs canadiens? Beaucoup d'agriculteurs ne sont pas en mesure de vendre leurs produits quotidiennement et de soutenir la concurrence des multinationales céréalières qui nous garantissaient un prix du marché équitable pour nos grains.

La fin de la CCB entraînera inévitablement la fin des petits agriculteurs. La hausse des coûts de commercialisation forcera les petits agriculteurs à vendre leur exploitation agricole à de plus gros exploitants ou à des sociétés agro-industrielles. Cela aura des répercussions directes sur toutes les petites villes des Prairies qui dépendent des agriculteurs autonomes pour soutenir leurs entreprises.

Je veux lire une autre lettre qui vient de la Saskatchewan :

Je suis inquiet et franchement choqué de voir que l'on fait adopter le projet de loi C-18 de force sans l'application régulière de la loi et sans donner aux agriculteurs la possibilité de voter avant que toute décision soit prise, comme cela leur avait été promis. Il est à mon avis illogique qu'un projet de loi visant à faire disparaître la Commission canadienne du blé puisse être adopté sans qu'on ait consulté les agriculteurs canadiens.

Honorables sénateurs, je crois au processus démocratique. Nous devons aux producteurs de blé de l'Ouest un deuxième examen réfléchi du projet de loi. Nous leur devons de les écouter.

Le sénateur Plett et le gouvernement conservateur affirment que c'est une bonne décision pour les producteurs de blé du Canada. Puisque que vous utiliserez votre majorité pour faire adopter le projet de loi C-18, j'espère que vous avez raison. En fait, je prie pour que vous ayez raison parce que, sinon, la commission aura été détruite et avec les accords commerciaux en vigueur, la décision ne pourra jamais être renversée.

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, je n'ai que quelques mots à dire. Je rumine le discours éloquent et passionné du sénateur Plett, qui s'est porté à la défense du principe de la suprématie parlementaire. Je crois que nous conviendrons tous qu'il est fondamental, dans notre système de gouvernement, que le Parlement possède cette suprématie.

(1610)

Le Parlement peut adopter des lois et il peut les modifier, mais il n'a pas le droit de les enfreindre. Il me semble très clair que c'est ce que le Parlement est en train de faire. La loi actuelle prévoit que le ministre ne peut pas présenter de mesure comme celle dont nous sommes saisis avant, entre autres choses, d'avoir consulté les agriculteurs et que avant ces derniers aient approuvé le changement dans le cadre d'un vote.

Dieu sait que nous avons entendu à plusieurs reprises nos vis-à-vis affirmer que les agriculteurs avaient été consultés le 2 mai. Cependant, nous savons tous que les élections portaient sur plus d'un enjeu. Même si ce n'était pas le cas, le ministre de l'Agriculture, comme nous l'ont rappelé mes éloquents collègues, avait donné aux agriculteurs l'assurance qu'ils seraient consultés et qu'ils pourraient voter sur le changement proposé.

Je suis Québécoise et ce processus me rappelle étrangement ce que ma province a vécu deux fois maintenant. Dans ma province, il y a un parti, un parti démocratique et légal, qui a remporté deux fois les élections en disant, entre autres : « Nous sommes en faveur de l'indépendance du Québec, de la séparation du Québec du reste du Canada. Toutefois, si vous, les citoyens du Québec, nous élisez, nous ne considérerons pas cette victoire comme un mandat pour faire l'indépendance du Québec. Nous mènerons une consultation distincte sur cette question. »

La comparaison semble peut-être exagérée à certains sénateurs, mais pas à moi, parce que, au Québec, nous comptions beaucoup sur la validité de cet engagement. Nous avons fait confiance à ce parti et nous avons eu raison, car, les deux fois où il a été élu, il a tenu un référendum sur l'indépendance. Les Québécois, dont un grand nombre qui avaient élu ce parti, mais qui ne souhaitaient pas faire l'indépendance, ont pu exprimer leur préférence lors du référendum.

Il me semble que ce que l'on s'apprête à demander au Parlement de faire est profondément mauvais et trahit la confiance fondamentale sur laquelle notre système doit reposer.

L'honorable Pana Merchant : Honorables sénateurs, trois événements politiques récents au Canada illustrent les nombreuses facettes de la démocratie. Ces trois événements, en particulier, en disent long sur l'avenir qui est réservé à la Commission canadienne du blé.

Trois chiffres, des pourcentages, représentent et illustrent avec éloquence la façon dont la démocratie fonctionne actuellement dans notre pays. Ces pourcentages sont 64, 62 et 39 p. 100. Que représentent ces chiffres? Qui a obtenu combien, où et quand? Qui a obtenu 64 p. 100, qui a obtenu 62 p. 100 et qui a obtenu 39 p. 100?

Je crois que ces trois pourcentages résument qui nous sommes et ce que nous voulons en 2011. Le Parti conservateur a récolté 39 p. 100 des voix aux élections générales de cette année, seulement 39 p. 100. Toutefois, lors du plébiscite de la Commission du blé, 62 p. 100 de ceux qui ont voté ont dit appuyer la Commission canadienne du blé. Quiconque a un tant soit peu d'honnêteté intellectuelle ne peut pas affirmer que 39 p. 100 équivaut à un mandat pour modifier le statut de la Commission canadienne du blé alors que, quelques semaines plus tard, les mêmes électeurs canadiens ont appuyé la Commission du blé à hauteur de 62 p. 100. C'est un écart de 23 p. 100. Même en tenant compte des variables statistiques dans cette comparaison, cet écart demeure énorme, pour ne pas dire décisif.

Qui a remporté 64 p. 100 des voix? Le Parti de la Saskatchewan, lors des élections qui se sont tenues récemment dans ma province. Je mentionne cela simplement parce que de nombreux commentateurs politiques ont salué ce résultat comme une grande victoire pour la démocratie, ce qui était le cas.

Quelle est la différence entre 64 p. 100 et 62 p. 100 lors d'un exercice démocratique? Je crois que, devant un écart de deux points entre deux scrutins, le Canadien moyen raisonnable estimerait qu'en fait, cette marge est insignifiante. Comment se fait-il, alors, qu'une victoire électorale provinciale en Saskatchewan avec 64 p. 100 des suffrages est un grand moment de vérité et de satisfaction, alors qu'un plébiscite qui montre que 62 p. 100 des agriculteurs appuient la Commission canadienne du blé est soudainement sans importance, futile, sans valeur et à rejeter?

Il y a quelque chose de fondamentalement inacceptable dans tout cela. On vante les mérites de la démocratie et, en même temps, on traite avec mépris les 62 p. 100 d'agriculteurs qui appuient la Commission canadienne du blé.

N'y a-t-il pas lieu d'avoir honte? Est-ce dorénavant sur la politique, et non sur la démocratie, que reposeront les politiques publiques? Je crois que les Canadiens sont en droit de s'attendre à plus de la part des processus politiques qui englobent les politiques publiques. Le fait de ne pas respecter l'appui sans équivoque de 62 p. 100 des agriculteurs à l'égard de la Commission canadienne du blé est un accroc à notre démocratie. La honte qui accompagne le rejet de la volonté des agriculteurs éclabousse tous les membres de la classe politique.

J'ai vraiment honte de ce qui se passe à l'heure actuelle.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud : Honorables sénateurs, le moins que l'on puisse dire, c'est que ce débat est très intéressant et que l'on entend plusieurs affirmations de part et d'autre. On pourrait même dire que, à un moment donné, il y a une certaine écoute sélective, et je dirais, honorables sénateurs, plutôt de l'autre côté de la Chambre. Cependant, Son Honneur le Président n'a pas à poser de jugement sur cette affirmation.

Je vais peut-être trahir mon âge lorsque je vais dire : « La loi, c'est la loi! » N'est-ce pas Séraphin qui disait cela à un moment donné? J'ai l'impression que maintenant, lorsqu'on le dit, cela ne tient pas. J'ai l'impression de participer à un débat qui ne devrait pas avoir lieu.

On a affirmé que le Parlement est l'autorité suprême pour modifier des lois et en proposer de nouvelles. Je suis tout à fait d'accord avec cela, mais nous devons aussi respecter les lois qui sont en place. C'est ce qui nous gouverne. Personne n'a le droit de les enfreindre; je ne crois pas que nous ayons le droit de le faire.

Toute action qui devrait être prise en relation avec la Commission canadienne du blé devrait l'être conformément à la Loi sur la Commission canadienne du blé. L'honorable sénateur Fraser l'a bien dit. Nous avons, à l'article 47.1 de cette loi, un processus à suivre pour apporter tout changement à la Commission canadienne du blé. On y dit qu'on doit d'abord consulter les fermiers et qu'un vote doit être tenu. Je cite l'article 47.1 :

b) les producteurs de ce grain ont voté [...]

— s'ils ont voté en faveur ou contre —

[...] — suivant les modalités fixées par le ministre [...]

(1610)

On dit que nous allons donner le choix aux agriculteurs de l'Ouest, mais on ne leur donne pas le choix de voter sur ce qui leur est proposé. Cela n'a pas beaucoup de sens. Parlons-nous de démocratie? Si nous avions agi selon la loi actuelle, nous aurions respecté le processus démocratique, nous aurions donné à ces gens l'occasion de s'exprimer.

On nous dit qu’une consultation a eu lieu et qu’il s’agit des élections. La loi ne parle pas des élections, mais elle prescrit qu’il doit y avoir une consultation. Pourquoi le ministre a-t-il choisi d’agir autrement? Il avait pourtant dit, avant les élections, qu’il ne voulait pas toucher à la Commission canadienne du blé avant, à moins que les agriculteurs ne s’expriment en ce sens.

Si j'avais été agriculteur dans l'Est ou dans l'Ouest, ou peu importe, j'aurais cru le ministre parce qu'il se prononce avec autorité. Je me serais fié au fait que, s'il devait y avoir des changements à proposer pour la Commission canadienne du blé, des consultations aient lieu.

Comme je l'ai dit plus tôt, nous ne devrions pas tenir ce débat car cela fausse tout le processus. Mais voilà, je crois que le train a quitté la gare et nous allons, la semaine prochaine, entendre des témoins.

C'est à la suite des représentations des agriculteurs de l'Ouest venus ici nous rencontrer, à leurs frais, que nous avons réussi à enfin nous organiser pour qu'ils soient entendus au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Il ne fait aucun doute que nous allons les écouter et que nous leur donnerons toute la latitude dont ils auront besoin pour exprimer leurs doutes, leur appui ou leur opposition concernant la Commission canadienne du blé.

[Traduction]

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, au cours des dernières semaines, nous avons abondamment discuté de la Commission canadienne du blé et du rôle qu'elle occupe dans la vie des agriculteurs de l'Ouest. Je prends la parole aujourd'hui afin de parler du projet de loi C-18, car il est important pour moi et pour les agriculteurs de l'Alberta, la province d'où je viens.

Je suis née à la campagne, dans le Nord de l'Alberta, où bon nombre de gens vivent de l'agriculture. Je suis fière de pouvoir représenter aujourd'hui, au Sénat, la voix des agriculteurs qui n'a pas été entendue.

Au cours des derniers mois, j'ai reçu un nombre incalculable de lettres d'agriculteurs de l'Alberta ainsi que du Manitoba et de la Saskatchewan, qui exprimaient tous de graves préoccupations dans la manière dont ce gouvernement a géré les questions relatives à la Commission canadienne du blé.

Honorables sénateurs, personne ne serait assez bête pour dire que les agriculteurs canadiens sont unanimement favorables ou unanimement défavorables à la Commission canadienne du blé. Cependant, je pense qu'il est raisonnable de croire que nous respectons tous le droit de chacun de se faire entendre sur une question qui le touche directement, surtout si ce « droit » est prévu par la loi. C'est à cet égard, honorables sénateurs, que le gouvernement conservateur a lamentablement manqué à ses engagements envers les agriculteurs canadiens. En empêchant les agriculteurs de se prononcer sur l'avenir de la Commission canadienne du blé, le gouvernement les a privés de leur droit de vote et se les est mis à dos.

Comme le sénateur Fraser l'a exposé si éloquemment, l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé a force de loi. Je vais relire l'article 47.1 de la loi. Certes, cet article a été cité à de nombreuses reprises aujourd'hui, mais la loi est la loi, et nul ne peut enfreindre la loi. En vertu de la loi, le ministre de l'Agriculture ne peut présenter une mesure législative ayant pour effet de soustraire quelque type, catégorie ou grade de grain que ce soit de la structure de commercialisation à guichet unique, à moins que les conditions suivantes ne soient réunies :

il a consulté le conseil au sujet de la mesure;

b) les producteurs de ce grain ont voté — suivant les modalités fixées par le ministre — en faveur de la mesure.

C'est assez clair.

Une voix : Cela ne peut être plus clair.

Le sénateur Tardif : En éliminant le guichet unique, le gouvernement soustrait en fait tous les types de céréales au pouvoir de l'organisme sans respecter les obligations prévues aux alinéas a) et b). La loi garantit aux producteurs de céréales le droit de se prononcer par vote sur ces modifications substantielles du fonctionnement de la Commission canadienne du blé. Or, la mesure législative imposée par le gouvernement contrevient directement à la Loi sur la Commission canadienne du blé.

Le plus troublant, c'est que, il y a tout juste huit mois, en mars, à la veille du déclenchement des élections, le ministre a assuré aux agriculteurs qu'il n'y avait aucune raison de s'inquiéter et que le gouvernement n'allait pas agir arbitrairement dans le dossier de la Commission canadienne du blé.

Honorables sénateurs, des manifestations ont été organisées un peu partout au Canada. Des campagnes de protestation ont surgi sur Internet et dans les médias sociaux. Des agriculteurs des Prairies se sont déplacés à Ottawa, à leurs frais, pour essayer de se faire entendre par le gouvernement.

De leur côté, mes collègues de la Chambre et du Sénat ont été solidaires des agriculteurs des Prairies et ils ont demandé au gouvernement de leur donner la possibilité d'être entendus.

Hélas, ces doléances sont tombées dans l'oreille d'un sourd. Nous avons assisté à la plus décevante démonstration au Sénat de la mauvaise volonté du gouvernement lorsque les sénateurs d'en face ont rejeté deux amendements distincts visant à ce que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts tienne des audiences dans les provinces des Prairies pour vraiment donner aux agriculteurs la possibilité de se faire entendre.

Notre demande était simple : discutons du projet de loi là où cela compte vraiment; discutons du projet de loi là où les familles et leur gagne-pain sont touchés par cette question. Honorables sénateurs, je présume donc que le gouvernement ne voulait pas de ces audiences parce qu'il craignait de ne pas aimer ce qui y aurait été dit.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Tardif : J'ai écouté des sénateurs ministériels affirmer au Sénat que les agriculteurs qui veulent conserver la Commission canadienne du blé pourront toujours utiliser ses services, volontairement. C'est absolument faux, et je sais qu'ils savent que j'ai raison. La principale caractéristique de la commission est son système à guichet unique. Si la commission ne profite plus d'un guichet unique, n'a plus de capitaux et n'a pas accès aux installations de manutention du grain, il ne restera qu'une coquille vide vouée à l'échec. Je ne partage pas les idées du gouvernement, mais je m'attends tout de même à ce qu'il ait le courage de ses convictions et qu'il présente franchement les politiques qu'il souhaite appliquer, au lieu de cacher délibérément les effets recherchés d'une mesure législative.

L'absence manifeste d'étude de l'incidence économique de cet important projet de loi a été soulignée par un certain nombre de mes collègues. Juste pour l'intérêt de la chose, je veux porter à l'attention des sénateurs un rapport de PricewaterhouseCoopers présenté en 2005 à la suite d'une analyse de l'incidence économique de la Commission canadienne du blé. Le rapport portait sur les retombées annuelles attribuées à l'activité économique de la commission dans la ville de Winnipeg, où se trouve le siège de la commission, dans l'ensemble des provinces de l'Ouest et dans le reste du Canada.

(1630)

L`apport brut de la commission au Canada attribuable au total des dépenses et primes initiales de 751,7 millions de dollars s'élevait à 1,6 milliard de dollars. Par ailleurs, outre les 460 emplois à la commission même, 14 239 emplois à plein temps ont été au Canada grâce aux dépenses et primes initiales de la commission. Mis à part les salaires des employés de la commission, les emplois attribuables à l'existence de la commission, au Canada, généraient des revenus estimés à 519,3 millions de dollars.

Je tire de ce rapport un dernier point intéressant : l'idée que les activités de la Commission canadienne du blé génèrent des recettes importantes pour le gouvernement. Quelque 360,1 millions de dollars versés en impôts à tous les ordres de gouvernement sont générés par les dépenses et les primes initiales de la commission au Canada. Honorables sénateurs, ce ne sont pas là des sommes négligeables. L'absence d'étude de l'incidence économique du projet de loi dont nous débattons suscite chez moi de graves préoccupations.

Puisque le gouvernement n'a pas permis aux agriculteurs de faire entendre leur voix officiellement en votant, j'aimerais utiliser mon temps de parole pour que certaines de leurs opinions soient officiellement consignées. Je vais lire des extraits de lettres que j'ai reçues.

Il y a deux semaines, j'ai reçu une lettre d'un agriculteur du centre de l'Alberta. En voici un extrait :

Madame le sénateur Tardif,

S'il est une question qui doit faire l'objet d'un second examen objectif, c'est le projet de loi C-18.

Cette année, j'ai fait ma 35e récolte de grains. En 1998, j'ai participé aux audiences du Comité sénatorial de l'agriculture, dans le cadre de l'étude du projet de loi qui nous a donné notre Commission canadienne du blé dirigée par les agriculteurs. L'un des éléments clés de cette mesure législative, c'était le droit des agriculteurs de tenir un plébiscite, en bonne et due forme, sur toute modification substantielle apportée au mandat de notre Commission canadienne du blé. Ce plébiscite et l'élection démocratique d'agriculteurs au conseil d'administration de la Commission canadienne du blé font de notre Commission canadienne du blé l'une des institutions les plus légitimes de notre société sur le plan démocratique.

Dans sa lettre, l'agriculteur mentionne également qu'il croit que la Commission canadienne du blé joue un rôle déterminant dans la santé économique globale du Canada. Je crois que je viens de vous donner certains de ces chiffres.

Voici un extrait d'une lettre que m'a écrite un autre agriculteur, de Grande Prairie, en Alberta :

Madame le sénateur,

Après avoir travaillé plusieurs jours d'affilée de 8 heures à minuit, mon fils et moi avons terminé la récolte le 2 novembre. Pendant ce temps, le gouvernement du premier ministre Harper s'employait à faire adopter à toute vapeur le projet de loi visant à abolir la Commission canadienne du blé, faisant preuve d'un mépris total pour le droit des producteurs de grain de défendre leurs intérêts.

Par souci de justice envers les producteurs de grain de l'Ouest et les collectivités rurales, je demande au Sénat de tenir des audiences publiques partout dans l'Ouest canadien.

Nous avons bien essayé et nous connaissons le résultat. Voici la suite de la lettre :

Cela nous permettrait d'expliquer au gouvernement et au public les répercussions que ce changement irréversible aura sur nos exploitations agricoles, nos collectivités rurales et l'environnement.

Le Sénat pourrait aussi envisager de tenir le vote auprès des producteurs de blé et d'orge comme le prévoit la Loi sur la Commission canadienne du blé, étant donné que les dernières élections fédérales n'étaient pas un référendum sur la commercialisation du grain dans l'Ouest du Canada.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Tardif : Honorables sénateurs, il y a quelques jours à peine, j'ai reçu une autre lettre, celle-là d'un agriculteur habitant près de la collectivité de Camrose, en Alberta. Voici ce qu'il dit :

Notre municipalité rurale est située dans la région centrale de l'Alberta. Notre collectivité agricole prospère grâce aux agriculteurs locaux et à leur familles.

La Commission canadienne du blé joue un rôle important dans nos infrastructures en préservant, pour les producteurs céréaliers, le précieux mode de vie des petites villes qui a grandement contribué à la création du merveilleux pays dans lequel nous vivons.

Assurer la croissance et la viabilité de notre collectivité est l'aspect le plus important de notre patrimoine; celui-ci est menacé par le démantèlement de la Commission canadienne du blé. C'est un enjeu de taille pour nous, car le transport de notre grain est assuré par des camions et des wagons de producteurs qui circulent sur des lignes ferroviaires sur courte distance. Les silos-élévateurs locaux ont disparu, de même que le service du chemin de fer catégorie 1 en raison de la rationalisation pendant la période qui a suivi le tarif du Nid-de-Corbeau. Cette question est aussi fort préoccupante pour les agriculteurs qui cultivent de 1000 à 2000 acres et les agriculteurs en herbe, ainsi que pour mon fils, qui commence tout juste à pratiquer l'agriculture pour gagner sa vie.

Ce ne sont là que quelques-unes des très nombreuses lettres que nous avons reçues.

Honorables sénateurs, nous avons une dernière occasion, à titre de Chambre de second examen objectif, de donner à ceux dont le gagne-pain sera directement touché par ce projet de loi la possibilité d'être entendus. Il va de soi que cette mesure va franchir l'étape de la deuxième lecture. Par conséquent, j'aimerais que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit saisi du projet de loi le plus tôt possible, afin qu'il puisse commencer à entendre les agriculteurs et les autres intervenants qui vont venir témoigner.

Je dois admettre que je suis déçue que le gouvernement se soit opposé à ce que le comité puisse se rendre sur place pour entendre les personnes qui seront les plus touchées par cette mesure législative. Si les sénateurs d'en face avaient appuyé notre motion, le comité aurait pu se rendre au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta pour entendre tous ceux qui souhaiteraient prendre la parole. Malheureusement, cela ne va pas se produire.

J'espère néanmoins que le comité va écouter attentivement les personnes qui viendront témoigner. J'espère aussi que les membres du comité vont faire un examen approfondi et minutieux de cette mesure législative, et qu'ils vont tenir compte des observations des témoins. Cette diligence constitue le véritable mandat de nos comités et de notre assemblée. Par conséquent, j'ai hâte que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts mène son étude.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : L'honorable sénateur Plett propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Patterson, que le projet de loi C-18, Loi réorganisant la Commission canadienne du blé et apportant des modifications corrélatives et connexes à certaines lois, soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carignan, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.)

Projet de loi instituant la Journée nationale de la philanthropie

Troisième lecture

L'honorable Terry M. Mercer propose que le projet de loi S-201, Loi instituant la Journée nationale de la philanthropie, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je ne veux pas prononcer de discours. Toutefois, je tiens à remercier le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie d'avoir tenu compte de mon horaire personnel et de m'avoir permis de témoigner aujourd'hui plutôt que la semaine dernière. Je remercie aussi les membres du comité des questions et du débat honnête de ce matin, ainsi que des observations formulées par mes collègues des deux côtés relativement à l'objet du projet de loi. J'exhorte tous les sénateurs à appuyer cette mesure.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

(1640)

L'Industrielle Alliance Pacifique, Compagnie d'Assurances Générales

Projet de loi d'intérêt privé—Troisième lecture

L'honorable Michael A. Meighen propose que le projet de loi S- 1002, Loi autorisant l'Industrielle Alliance Pacifique, Compagnie d'Assurances Générales, à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec, soit lu pour la troisième fois.

— Honorable sénateur, inspiré par la concision du sénateur Mercer, je souhaite également remercier tous les sénateurs d'avoir fait avancer aussi rapidement l'étude de ce projet de loi. Je veux surtout remercier le sénateur Dawson, porte-parole de l'opposition, ainsi que le sénateur Wallace, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, d'avoir pris le temps d'entendre des témoins ce matin.

Honorables sénateurs, votre collaboration aidera sensiblement le demandeur à rationaliser sa structure organisationnelle et à réduire ses coûts, ce qui créera des emplois et de la richesse pour les Canadiens de l'ensemble du pays.

Je pourrais en dire davantage, mais je vais m'abstenir.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Règlement, procédure droits du Parlement

Premier rapport du comité—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Smith, C.P. (Cobourg), appuyée par l'honorable sénateur Cordy, tendant à l'adoption du premier rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement (Règlement du Sénat révisé), présenté au Sénat le 16 novembre 2011.

L'honorable Terry Stratton : Honorables sénateurs, je serai bref moi aussi.

Cette question est importante pour tout le monde dans cette enceinte et le demeurera pendant un bon moment. J'estime que nous sommes tous tenus de nous familiariser avec le nouveau Règlement proposé. La tâche ne sera pas facile, étant donné que ce n'est pas une lecture de chevet particulièrement emballante.

J'estime important d'étudier cette motion assez rapidement après notre retour de la pause de Noël, parce qu'elle pourrait être rayée du Feuilleton si nous attendons trop longtemps pour l'aborder.

Lorsque j'étais whip de l'opposition pendant de nombreuses années, le sénateur Kinsella était l'expert en ce qui concerne le Règlement. Je serais curieux de connaître son opinion sur ce remaniement du Règlement. J'espère qu'il appuierait cette initiative. Il est important pour le Sénat de connaître l'opinion d'une personne possédant une telle expertise en ce qui concerne le Règlement actuel. J'apprécierais énormément qu'un expert exprime son avis.

Je remercie également les personnes qui ont travaillé au sous- comité et au comité du sous-comité et, bien sûr, le personnel qui a fourni une aide d'une valeur inestimable pour mener cette tâche à bien.

Les sénateurs ne veulent peut-être pas prendre la parole sur cette question, mais je demanderai aux sénateurs de notre caucus, la semaine prochaine, de me faire savoir s'ils veulent prendre la parole au sujet de ce rapport de comité, car il sera important que nous en discutions un jour ou l'autre.

Son Honneur le Président : Le Sénat est-il d'accord pour que cet article reste inscrit au nom du sénateur Smith?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Stratton, au nom du sénateur Smith, le débat est ajourné.)

Deuxième rapport du comité—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement (Modifications au Règlement du Sénat relatives aux congés et aux suspensions), présenté au Sénat le 29 novembre 2011.

L'honorable David Braley propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, le rapport qui vous est soumis propose des ajustements aux règles concernant les congés et les suspensions. Le Comité du Règlement a examiné ces questions à la lumière des expériences récentes, et les changements que nous préconisons sont assez simples, mais néanmoins importants.

Nous avons relevé deux questions qui nécessitent notre attention : premièrement, le fait de continuer d'avoir accès aux ressources du Sénat durant un congé sans qu'un contrôle puisse être exercé et, deuxièmement, le fait qu'une déclaration de culpabilité et l'imposition d'une peine autre que le renvoi soient toutes deux nécessaires pour qu'une suspension prenne effet. Un troisième point lié au mécanisme qui enclenche tout le processus est aussi traité dans les changements proposés.

En ce qui a trait au premier point important, lorsque le sénateur Austin — qui était à l'époque le président du Comité du Règlement — a pris la parole relativement au rapport qui créait ces dispositions le 6 décembre 2001, il a mentionné qu'une absence autorisée s'appliquait uniquement au rôle d'un sénateur au Parlement, et non pas aux fonctions de représentation. C'est pour cette raison qu'un sénateur en congé autorisé continue d'avoir accès à des fonds et à des services de soutien lorsqu'il assume ses responsabilités de représentation. Cela dit, il est devenu évident qu'un certain contrôle de cet aspect s'impose.

Il n'est pas possible de prévoir des règles strictes pour toutes les situations imaginables. C'est pour cette raison que le Comité du Règlement propose que lorsqu'un sénateur se voit accorder un congé autorisé parce qu'il fait l'objet d'accusations criminelles, le Comité de la régie interne devrait avoir le pouvoir de suspendre l'accès à une partie ou à la totalité des ressources du Sénat, s'il y a lieu. Cette mesure ne toucherait pas l'indemnité de session. Le Comité de la régie interne ne serait pas tenu de suspendre l'accès aux ressources, mais il pourrait le faire au besoin. Cette proposition se trouve dans le nouvel article 140(2.1) du Règlement.

Le deuxième point important est lié à la période de temps qui s'écoule entre le moment où un sénateur est reconnu coupable et le prononcé de la peine. En vertu du système actuel, le sénateur continue de toucher son indemnité de session durant cette période. Là encore, il serait plus approprié de prévoir la possibilité d'exercer un certain contrôle. C'est pour cette raison que, en vertu l'article 139(2.1) qui est proposé, le Comité de la régie interne aurait le pouvoir de suspendre le versement de l'indemnité de session d'un sénateur qui a été reconnu coupable mais qui n'a pas encore reçu sa sentence. Cette disposition permettrait de traiter certains cas où une telle façon de faire serait indiquée, sans pour autant adopter une approche rigide qui s'appliquerait à tous les cas.

Le Comité du Règlement a aussi constaté que, en vertu du système actuel, c'est le sénateur accusé d'avoir commis une infraction qui doit fournir la lettre qui entraîne une absence. Le comité juge qu'une autre option devrait être disponible dans le cas où la lettre ne serait pas fournie dans un délai raisonnable. Les révisions proposées des articles 140(1) et 140(2) du Règlement permettraient au Président de déposer le document nécessaire dans un tel cas.

Honorables sénateurs, comme je l'ai mentionné au début de mon intervention, ces changements sont relativement simples, mais ils donneraient une certaine souplesse aux dispositions pertinentes du Règlement ainsi qu'un contrôle accru. Je vous invite à les adopter après un examen en bonne et due forme.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

(1650)

[Français]

L'ajournement

Adoption de la motion

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement :

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 6 décembre 2011, à 14 heures.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 6 décembre 2011, à 14 heures.)


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